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Analyses - 31 mai 2004

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mai 2004

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Demande, offre et Internet: trois accélérateurs de la tendance du dernière minute

La réservation tardive est devenue un phénomène structurel qui s’est ancré dans les pratiques du consommateur et dans les stratégies de nombreux fournisseurs. Une étude exploratoire commandée par la Direction du Tourisme en France nous permet de mieux comprendre les raisons de l’explosion de ce phénomène.

Le concept de dernière minute réfère à deux notions distinctes:

  • un produit mis en solde à la dernière minute pour généralement écouler les stocks invendus;
  • la personne achetant tardivement un produit qui ne comporte pas une réduction de prix.

Le temps est devenu une denrée rare

Il a été dit maintes fois que la succession de catastrophes qui a frappé le tourisme a exacerbé la tendance au dernière minute. Craintifs, les gens n’achètent plus longtemps à l’avance, ce qui engendre l’incertitude auprès des fournisseurs qui, à leur tour, offrent des tarifs promotionnels pour stimuler les ventes.

Malgré l’accélération récente de ce comportement, le dernière minute est issu en grande partie du rapport qu’ont les gens avec le temps. Pression, urgence, zapping, instantanéité de l’Internet s’imposent comme modèles de notre relation avec le temps. Du toujours plus vite au dernière minute, le consommateur prend l’habitude d’obtenir tout, tout de suite et n’importe quand… même les vacances!

Le «consommacteur»

Le consommateur est devenu un «consommacteur». Plus expérimenté, il veut faire son choix en toute connaissance de cause et pouvoir comparer prix et produits afin d’acheter intelligemment. Ce consommacteur a compris que les soldes s’étalent sur toute l’année et que le temps joue en sa faveur, car les fournisseurs finissent par écouler les prestations restantes à des prix avantageux.

Plusieurs facteurs font en sorte que l’achat de dernière minute répond aux réalités du voyageur:

  • la difficulté de concilier les horaires de vacances des deux conjoints qui travaillent;
  • le fractionnement des vacances et la variation de la durée, qui multiplient la possibilité de départs;
  • les différents types de séjours et de destinations qui diminuent la nécessité d’une longue planification;
  • les départs hors saison qui facilitent un départ improvisé.

Quand le Web s’en mêle

Le Web a incontestablement accéléré le développement du phénomène de dernière minute grâce à la facilité et à la rapidité de la mise en ligne de ce type de produits.

Les médias ont aussi contribué à populariser la vente de ces produits auprès du consommateur et ce dernier bénéficie des avantages suivants:

  • l’offre est accessible en tout temps;
  • la réservation peut se faire le jour même du départ;
  • la comparaison des tarifs devient facile;
  • les différents fournisseurs sont à portée de clic;
  • la possibilité d’assembler un forfait en ligne raccourcit le délai de réservation.

Guerre des prix et des délais

Dans un contexte de vive concurrence, la vente de dernière minute est vue comme la conséquence d’une offre de produits standardisés, où le prix et les délais deviennent un facteur de différenciation. Ayant recours au yield management, les gestionnaires peaufinent leur stratégie de prix afin d’optimiser les taux de remplissage.

En France, mises à part les agences spécialisées dans ce créneau, quelques données quantitatives relatives au volume d’affaires révèlent que:

  • la proportion des ventes de dernière minute restent relativement faibles: 5 à 10% du chiffre d’affaires;
  • les réservations tardives sont plus importantes: 20 à 30% du chiffre d’affaires.

Afin de contourner le comportement volage de l’internaute, certains acteurs envisagent de rendre obligatoire l’identification du consommateur pour pouvoir avoir accès aux promotions.

Une clientèle hétéroclite

Qui achète ce type de produits? Achètent-ils tardivement pour bénéficier des aubaines ou simplement parce qu’ils arrêtent leur choix de vacances de plus en plus tard, ou encore, parce qu’ils partent plus souvent? Le profil de la clientèle et les motivations d’achat pour ce type de produits restent encore difficiles à établir et à quantifier.

En général, le produit de dernière minute rime rarement avec clientèle familiale, car les vacances en famille sont habituellement planifiées plus longtemps à l’avance. De même, un vol sec ou un forfait tout inclus sont plus propices au dernière minute que le produit sur mesure et la prestation complexe.

Les professionnels français mentionnent que l’acheteur de dernière minute ne se différencie pas de la clientèle régulière, car il s’agit souvent du même individu qui a ponctuellement acheté ce type de produit. Le client de dernière minute est aussi décrit comme celui qui visite au moins trois à quatre sites à la recherche du meilleur coût avant d’arrêter son choix. Les clients ont été classés en trois catégories:

  • les chasseurs de promotions – à l’affût de promotions intéressantes;
  • les impulsifs – pour qui la dernière minute est un mode de vie;
  • les attentistes de la promotion – pour les budgets serrés qui n’ont pas les moyens de payer le prix régulier.

Bien qu’Internet soit le moyen le plus utilisé pour la recherche de ce type de produit en France, ce canal n’est pas privilégié pour effectuer la réservation. Environ deux clients sur trois préfèrent finaliser leur achat par téléphone.

Aux États-Unis, ce type de comportement est très présent et se caractérise principalement par des voyages de proximité et de courte durée. Une enquête de la Travel Industry Association of America (TIA), publiée en 2002, indiquait que:

  • 64% des voyageurs d’agrément (83 millions d’adultes) avaient planifié au moins un de leurs voyages (dans l’année précédente) à l’intérieur de deux semaines avant le départ et, de ce nombre, 26% avaient projeté toutes leurs vacances à la dernière minute;
  • 39% ont invoqué la visite de parents et amis (principal motif) et 23% le divertissement (ex. événement sportif);
  • 69% se sont déplacés à l’intérieur de 500 milles de leur domicile et 15% à plus de 1000 milles.
  • 69% des voyages comportaient 4 nuits ou moins, et 9% aucune nuitée.

Le Canada n’échappe pas à ce phénomène. Les voyagistes ont constaté que les délais entre la demande de renseignements, la réservation et le départ du client ont considérablement diminué.

Les pièges du dernière minute

Ce type de pratique commerciale représente certains dangers potentiels:

  • la notion de «prix sacrifiés» peut nuire à l’image de la marque, laissant à penser que les prestations à prix normal sont trop chères et/ou se vendent mal;
  • un rabais accordé aux retardataires entre en conflit avec les notions de fidélisation ou de privilèges accordés aux clients fidèles;
  • le fait d’accorder directement aux clients des tarifs réduits peut interférer avec les accords passés auprès des réseaux de distribution;
  • habitués à bénéficier de prix promotionnels, les voyageurs risquent de ne plus vouloir acheter au prix régulier ou de refuser de payer le prix réel du produit;
  • cette pratique rend difficiles la planification et les estimations de vente des fournisseurs;
  • lorsque que les délais entre vente et séjour rétrécissent, les liquidités s’amenuisent;
  • la concurrence exercée sur le prix s’effectue souvent au détriment de la qualité du produit.

Sources:
– Commission canadienne du tourisme. «Perspectives estivales: tout dépend de la source», Tourisme, vol. 1, no 4, mai 2004.
– Internet Institute. «Étude exploratoire sur les ventes de dernière minute», Direction du Tourisme – Département de la Stratégie, de la prospective, de l’évaluation et des statistiques, février 2004.
– Travel Industry Association of America, «Two weeks to plan a trip proves to be plenty of time for leisure travelers», [www.tia.org], 5 novembre 2002.

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