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Analyses - 16 août 2004

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août 2004

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Et si les croisières voguaient vers le «low cost»?

En 2003, l’entreprise easyGroup, dont fait partie le transporteur aérien à rabais easyJet, signifiait son intention d’étendre son modèle d’affaires au secteur des croisières. Ce nouveau concept d’hôtel flottant à bas prix, easyCruise, ne fait cependant pas l’unanimité et plusieurs professionnels du voyage n’y croient pas. Est-ce que le concept «low cost» peut être appliqué avec succès dans l’industrie des croisières? Cette avenue représente-t-elle une occasion d’affaires pour le Québec?

Un parallèle avec le transport aérien

L’idée de proposer des croisières à tarifs réduits a suscité beaucoup de réactions au sein de l’industrie touristique. Lorsque les transporteurs aériens à rabais ont fait leur apparition, plusieurs demeuraient sceptiques quant à leur capacité à concurrencer directement les transporteurs réguliers. Aujourd’hui, le paysage aérien se trouve fondamentalement modifié en raison des succès retentissants qu’ont connus les compagnies low cost.

Il est intéressant de tracer un parallèle entre l’initiative d’easyCruise et le nouveau paysage du transport aérien. Dans les deux cas, on souhaite offrir le choix au consommateur qui désire acheter une prestation dépourvue d’extras, et ce, au plus bas prix possible. Pour une majorité de touristes, l’achat d’un billet d’avion représente une étape nécessaire (mais coûteuse) pour atteindre une destination. Les vols no frills en ont séduit plusieurs, incluant de plus en plus de voyageurs d’affaires. La philosophie d’easyCruise s’inscrit dans la même veine.

Concurrence aux croisières, pas si sûr!

L’initiateur du projet et fondateur d’easyJet, Stelios Haji-Ioannou, souhaite adopter la stratégie du prix le plus bas possible pour une croisière, un secteur à forte marge bénéficiaire. Sur le navire d’easyCruise, les cabines ne coûteront que 50 $US en moyenne par personne, mais le service offert sera minimaliste. Les clients devront payer repas et boissons et tous les autres à-côtés non essentiels. Même le ménage de la cabine sera en option.

En fait, c’est tout le côté glamour de la croisière qui est laissé de côté pour en réduire les coûts. Donc, pas de spectacles exclusifs, de soupers romantiques ou autres divertissements extravagants. Le temps de navigation sera réduit au maximum pour accroître le temps libre lors des escales.

On parle ici d’un produit complètement différent de la croisière traditionnelle, dont le prix comprend habituellement la portion aérienne vers le port d’embarquement. Le concept d’easyCruise se rapproche davantage du transport maritime que de la croisière tout inclus. Par ailleurs, la croisière traditionnelle est considérée comme un produit complexe, qui peut nécessiter un ratio d’un membre d’équipage par passager. Dans le cas d’easyCruise, ce rapport sera de 40 membres d’équipage pour 400 passagers.

Les croisiéristes ne perçoivent pas les croisières low cost comme une menace, mais comme une possibilité parmi d’autres types de vacances (le circuit automobile par exemple). Selon certains analystes, l’emploi du terme même relève de la stratégie marketing pour vendre un service de transport qui n’a rien à voir avec une croisière.

Pour la clientèle qui cherche un produit de luxe offrant une panoplie de divertissements, des buffets à volonté et un service remarquable, la croisière à tarif réduit ne constitue pas une option. Par contre, pour les gens qui souhaitent découvrir, à moindre coût, une région du globe à bord d’un hôtel flottant, il s’agit d’une avenue des plus intéressantes. L’entreprise vise particulièrement le segment des 20-40 ans. Internet constituera le canal de distribution privilégié par easyGroup.

Les itinéraires d’easyCruise ne sont pas encore fixés, mais on sait déjà que le bateau sillonnera le bassin méditerranéen pour s’arrêter notamment en France, en Espagne et en Italie. Actuellement en restauration, le navire sera opérationnel en 2005 et les réservations débuteront d’ici la fin de 2004.

Un créneau porteur

Les passagers devraient dépenser davantage lors des escales, d’où l’intérêt pour les destinations d’accueillir ces croisières. Il est plus facile d’attirer les passagers au restaurant quand le prix du transport en bateau n’inclut pas de fastes buffets. Les vacances se dérouleront davantage sur terre que sur l’eau. D’autant plus qu’économiser sur le transport est maintenant perçu comme «intelligent» et de moins en moins «m’as-tu-vu?».

Un tel concept de transport maritime sera peut-être compatible avec la tendance à la personnalisation des voyages. Les touristes préférant développer leur propre itinéraire lors des escales jugeront sans doute le produit intéressant, parce qu’il permet davantage de flexibilité. À l’opposé des croisières tout inclus, cette formule permet une plus grande latitude. Comme pour les autres types de croisières, on peut s’attendre à ce que les destinations en mesure d’offrir plusieurs attraits et activités soient privilégiées.

Une occasion d’affaires pour le Québec?

Le voyageur expérimenté réclamera de plus en plus de nouvelles destinations. Un circuit d’une semaine ou plus sur le Saint-Laurent vers l’intérieur du Québec pourrait s’avérer porteur auprès des marchés américains et européens. Si le projet d’easyGroup rencontre le succès, il y a fort à parier que d’autres voudront l’imiter et que les parcours se multiplieront.

Certaines entreprises québécoises offrent actuellement un service de transport maritime. Il y a Les Dauphins du Saint-Laurent qui, avec une navette quotidienne Montréal-Québec en quatre heures, concurrencent en quelque sorte le train et l’autobus. Quant aux parcours de plusieurs nuitées, le Relais Nordik et le Groupe CTMA combinent circuits touristiques et transport de passagers. Évidemment, il s’agit ici de produits différents du concept de croisière low cost. Pour un voyage entre Rimouski et Blanc-Sablon sur le N/M Nordik Express, un forfait de 6 nuits dans une cabine avec toilette et douche privées, incluant les repas, coûte environ 1200$.

Il existe une demande pour les croisières en eau froide à destination du Canada atlantique. L’offre sur ce marché est actuellement très limitée, particulièrement dans une optique de transport maritime à bas prix. Avec un fleuve navigable à l’année, le Québec peut très bien se positionner comme destination de croisière quatre saisons.

Dans l’éventualité d’un tel scénario de transport maritime, plusieurs escales constitueraient des visites d’intérêt. On n’a qu’à penser à la Basse-Côte-Nord (dont Harrington Harbour), à l’île d’Anticosti, aux îles de la Madeleine, au parc Forillon, au parc marin du SaguenaySaint-Laurent, sans oublier Montréal et Québec. Sans compter que pour les destinations éloignées où l’infrastructure touristique demeure parfois limitée, la venue d’un hôtel flottant représente une avenue intéressante.

Le Québec comme circuit de transport maritime à bas prix, pourquoi pas?

Sources:
– Port de Québec. Le vent du large nous amène une spectaculaire saison des croisières 2004, le 21 mai 2004.
– TourMag. Easycruise? Les professionnels n’y croient pas!, 13 mars 2004.
– Desvignes, Claudine. «La croisière se démocratise, l’exemple de Costa Croisières», Cahier Espaces, vol. 79, novembre 2003.

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