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Analyses - 19 mai 2005

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mai 2005

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Doit-on s’intéresser au marché russe?

On entend de plus en plus parler du potentiel prometteur du marché russe. Selon l’Organisation mondiale du tourisme, la Russie figurera parmi les dix premiers pays émetteurs de touristes internationaux d’ici 2020. Les dépenses des Russes pour des loisirs augmenteront de 400% de 2000 à 2015. Mais que connaît-on de ce nouveau bassin de visiteurs? Où prennent-ils leurs vacances? Comment voyagent-ils? Et, surtout, est-ce que le Québec devrait s’intéresser à cette clientèle?

Davantage qu’un marché marginal

En 2003, la Russie arrive au 13e rang parmi les clientèles internationales en termes de dépenses (7,6 milliards $US). Le pays compte 145 millions d’habitants et le nombre de voyageurs a considérablement augmenté au cours des dix dernières années, pour atteindre 20,5 millions en 2003 selon les chiffres publiés par le Comité d’État aux statistiques. Plusieurs de ces déplacements incluent toutefois les travailleurs qui franchissent les frontières quotidiennement. La firme IPK International évalue les réels voyages touristiques d’une nuit et plus à 12 millions en 2003. Ils devraient atteindre 14 millions en 2004.

Il y a bien sûr ce petit segment de la population (1 à 3%) appartenant à la classe excessivement aisée qui voyage régulièrement à l’étranger. Mais on remarque également l’émergence d’une classe moyenne qui forme environ 9% des Russes. Cette dernière possède des valeurs intimement liées à l’industrie du loisir, à la mode, à la consommation et aux voyages.

Près du quart de ce segment de population habite Moscou (22% des habitants). Ses revenus individuels oscillent de 20 000 à 40 000$ annuellement. Ces moscovites types disposent d’un appartement, d’une résidence secondaire, d’une automobile, d’un téléphone cellulaire et sont branchés sur Internet.

Quelques chiffres

Plus de la moitié (57%) des déplacements internationaux (11,6 millions de voyages) s’effectuent à l’intérieur des républiques de l’ex-URSS telles que l’Ukraine et l’Arménie. Pour le reste, la Finlande, la Chine et la Turquie récoltent une part importante de ce marché (graphique 1). 

Pour ce qui est du tourisme d’affaires, la Chine, les pays Baltes, les anciens pays de l’URSS, l’Allemagne et la Finlande constituent actuellement les principales destinations. D’autres pays comme la Turquie et l’Égypte se démarquent de plus en plus, notamment sur le segment des voyages de motivation. Selon l’enquête d’IPK, environ le quart des déplacements touristiques des Russes s’effectuent pour affaires.

Profil du marché

L’industrie touristique russe s’est développée de façon spectaculaire au cours des quinze dernières années. En 2003, on recensait quelque 3345 voyagistes et agences de voyages. Les touristes voyageant en groupes sont généralement accueillis par des professionnels russes travaillant dans le pays de destination. Ce sont les touristes individuels qui évoluent le plus rapidement.

Jacques Ragon, consultant, identifie trois profils distincts parmi les touristes russes.

  1. Les «nouveaux russes», qui se caractérisent par leurs excès. En effet, ils peuvent facilement dépenser plus de 25 000$ par semaine au cours de leurs voyages.
  2. Les «néophytes», préférant découvrir de façon économique, voyagent au sein de groupes nombreux.
  3. Les «avancés», constitués de Russes nouvellement aisés, possèdent un niveau d’études élevé, de même qu’une culture et un savoir-vivre supérieurs. Ce segment a le goût d’explorer de nouvelles destinations et n’hésite pas à le faire.

C’est la présence d’une offre authentique qui provoque chez les Russes l’envie de visiter une destination. On constate aussi un fort sentiment nationaliste qui entraîne un préjugé favorable à une offre adaptée à leurs besoins, telle qu’une partie d’un site Internet traduite en russe. Voici d’autres caractéristiques de ces voyageurs internationaux:

  • ils habitent dans les grandes villes, 
  • plus de 66% sont des hommes,  
  • environ la moitié (51%) a moins de 34 ans, 
  • le soleil et les plages constituent le type de vacances le plus prisé (36%), 
  • les visites urbaines sont tout aussi populaires (35%), 
  • ils privilégient l’hébergement 4 étoiles et plus, 
  • ils dépensent en moyenne 150 $US par jour, 
  • ils voyagent autant l’été que l’hiver, 
  • on constate leur engouement croissant pour des produits d’hiver comme le ski alpin, 
  • ils sont fiers d’effectuer leurs déplacements de manière autonome (ex.: voiture de location), 
  • ils recherchent le meilleur rapport qualité/prix.

Doit-on s’intéresser à ce marché?

Plusieurs pays européens situés aux portes de la Russie tirent bien leur épingle du jeu. Par contre, la force de l’euro pourrait amener les Russes à regarder ailleurs. On remarque notamment d’importantes baisses du côté de la Finlande, pays jugé désormais trop coûteux. Les voyageurs se tournent progressivement vers de nouvelles destinations qui leur procurent un meilleur rapport qualité/prix comme l’Inde, la Tunisie et Dubaï.

D’autres facteurs jouent un rôle favorable lorsque vient le temps d’évaluer l’intérêt potentiel du marché russe envers le Canada ou le Québec. Par exemple, cette clientèle a l’habitude de voyager sur de grandes distances, ce qui est compatible à nos grands espaces. De plus, ce segment affiche un niveau de dépenses supérieur. Si l’on se fie aux données recueillies par l’Université de Chypre, les Russes en visite sur l’île en 2000 et 2001 ont dépensé 48% plus que les Allemands et 23% plus que les Britanniques.

Bien que le Canada pourrait miser sur des produits offrant un meilleur rapport qualité/prix, en vertu d’un dollar plus abordable que l’euro, il semble que nous soyons encore loin de la mire russe. Actuellement, la Russie n’apparaît même pas dans le top trente des principaux pays émetteurs qui visitent le Canada. Toutefois, en dépit de son statut encore marginal pour le Québec, sa progression rapide mérite qu’on surveille ce bassin du coin de l’oeil. Mais il semble un peu prématuré pour les intervenants du Québec de s’y lancer avec des offensives soutenues et coûteuses. Plusieurs autres destinations plus «naturelles», tant sur les plans géographique qu’historique, attireront davantage l’attention des Russes à titre de premiers voyages. Peut-être apparaîtrons-nous dans le radar russe à moyen terme? Une révision des actions sur ce marché pourrait alors être envisageable.

Sources:
– Cockerell, Nancy. «Russia’s Travel and Tourism Industry», ITB Special Press Release, février 2005.
– Euromonitor. «Consumer Lifestyle in Russia», février 2005.
– Ragon, Jacques et Elena Soboleva-Cissac. «Le marché russe a changé!», Revue Espaces, no 223, février 2005.
– Semenov, Maksim. «La Russie, un marché potentiel considérable», Revue Espaces, no 223, février 2005.
– Semenov, Maksim. «Pour être fidélisés, les touristes russes doivent être mieux accueillis!», Revue Espaces, no 224, mars 2005.
– Statistique Canada. Enquête sur les voyages internationaux, 2004.

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