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Analyses - 17 mars 2006

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mars 2006

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Commentaire du professeur Yves Tinard sur le texte «En quoi l’arrivée du A380 changera-t-elle la donne?»

Expert associé au Réseau de veille en tourisme, M. Yves Tinard est économiste et professeur à l’École supérieure de management ESCP-EAP de Paris. Voici ses commentaires sur l’analyse intitulée «En quoi l’arrivée du A380 changera-t-elle la donne?»

L’A380: perspectives

Les stratégies de Boeing et d’Airbus sont radicalement différentes dans la mesure où leur vision de l’avenir n’est pas la même. Pour Boeing (qui mise actuellement sur le 787 Dreamliner, un appareil de 300 places), le marché des très gros-porteurs serait, à l’horizon 2025, de 500 appareils et, pour Airbus, il serait de 1500 (compte tenu de «l’explosion attendue» de la demande de transport aérien). L’avenir les départagera.

De l’attitude des aéroports

Au-delà du comportement de la clientèle (qui, finalement, acceptera ou non de prendre cet avion), le succès de l’A380 est également conditionné par l’accueil que lui réserveront les responsables des plates-formes aéroportuaires, encore que, en raison de sa taille, l’appareil ne peut être exploité que sur des grands axes et à partir des principaux aéroports internationaux. Même s’il peut parcourir 15 000 kilomètres sans escale, il sera bien évidemment utilisé sur de moindres distances. Certes, l’A380 a été conçu pour que, malgré sa lourdeur, les pistes n’aient pas à être renforcées; en effet, l’appareil étant doté de 20 roues, la pression qu’exerce chacune sur le sol est inférieure à celle enregistrée pour un 747. Néanmoins, pour l’accueillir, certains aménagements n’en sont pas moins nécessaires pour embarquer (et débarquer) un tel volume de passagers et pour permettre à cet appareil de taille atypique d’exécuter les manoeuvres nécessaires, notamment au sol.

Par ailleurs, à en croire les responsables de Boeing, dû aux importants remous d’air générés par cet avion (au décollage comme à l’atterrissage), il faudra bloquer le couloir aérien pendant quelques minutes, pour des raisons de sécurité, ce qui se traduira par un manque à gagner pour l’aéroport.

En conséquence, les compagnies utilisant des A380 pourraient subir des majorations de taxes aéroportuaires susceptibles d’affecter la rentabilité de l’appareil. Des taxes «anormalement élevées» seraient perçues comme un facteur de concurrence déloyale. Nombre d’aéroports, notamment aux États-Unis, entretiennent une relation privilégiée avec un transporteur dominant; si ce dernier se sentait menacé par l’éventuelle arrivée de compagnies équipées d’A380, ne pourrait-on pas craindre que l’aéroport concerné leur impose «des taxes dissuasives»?

Quid des compagnies américaines?

Même si le premier atterrissage d’un A380 en Amérique a eu lieu le 10 janvier 2006 sur l’aéroport José Maria Cordova près de Medellin (Colombie), nul doute que l’Amérique du Nord suscite les convoitises d’Airbus!En effet, pour que l’A380 soit un véritable succès commercial, encore faudrait-il qu’il soit commandé par des transporteurs nord-américains d’importance, eu égard au poids de cette zone géographique dans le secteur aérien. Mais tel ne semble pas être le cas actuellement. Dans la mesure où cet appareil est atypique par ses caractéristiques, il pourrait, en cas de succès auprès des compagnies américaines n’ayant pas encore eu recours aux services d’Airbus, se traduire par la remise en cause des contrats d’exclusivité qui les liaient à Boeing. Menace que le constructeur américain ne peut sous-estimer! On pourrait alors imaginer que soient relancées les accusations de Boeing, dénonçant régulièrement les aides dont bénéficieraient Airbus de la part des gouvernements européens. Officiellement, les dépenses de recherche-développement pour mettre au point l’A380 se sont élevées à 10,7 milliards de dollars (5,1 pour Airbus, 3,1 pour les partenaires et les équipementiers, les 2,5 restants correspondant aux avances remboursables des gouvernements). Ces points précisés, le gigantisme n’est pas en soi porteur de succès. Ainsi, le plus grand appareil d’avant-guerre (le Dornier X, équipé… de 12 moteurs) s’est soldé par un échec, de même que le projet d’avion géant d’Howard Hughes.

 

Yves Tinard, économiste et professeur, École supérieure de management ESCP-EAP de Paris

 

Champs d’expertise:

  • Réseau de distribution
  • Structures économiques et financières européennes

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