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Analyses - 2 juin 2006

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juin 2006

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Coup d’éclat: valorisation du tourisme au Québec et dans le monde (Compte rendu de conférence)

Lors des Assises de l’industrie touristique 2006, Paul Arseneault, directeur du Réseau de veille en tourisme de la Chaire de tourisme de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, a présenté des pistes de réflexion sur la thématique de la valorisation du tourisme québécois. De la définition au concept, en passant par la présentation d’exemples ailleurs dans le monde, M. Arseneault a soulevé la grande question: qu’est-ce que l’industrie touristique doit valoriser, auprès de qui, pourquoi et comment?

Qu’est ce que la valorisation?

D’un point de vue théorique, la valorisation réfère à la mise en valeur de quelque chose pour en tirer davantage de ressources ou pour obtenir plus de reconnaissance. Elle est donc en lien avec des réalités à la fois concrètes (valeur marchande, revenus, bénéfices, etc.) et abstraites (image, estime, appréciation, etc.).

De plus, la perception et les besoins de valorisation varient selon le contexte de l’entreprise et la conjoncture économique (croissance, stagnation, crise, etc.).

Le désir de valorisation peut être considéré selon deux points de vue:

  • la perception que l’on a de nous-même,
  • la perception que les autres ont de nous.

Cette double perception affecte directement notre façon d’interagir avec les autres et ces interactions influencent, en retour, la façon dont nous nous percevons et comment nous sommes perçus.

Le tourisme est en déficit d’affection

L’industrie touristique québécoise souffre actuellement d’un déficit d’affection et de reconnaissance auprès des médias et du public. Un survol des grands titres de la presse québécoise des derniers mois illustre assez bien que le tourisme et le développement touristique sont associés à la destruction des écosystèmes, à l’exploitation de la nature à des fins mercantiles, à la menace qui pèse sur l’intégrité du tissu social, à l’exploitation de travailleurs sans défense…

Il y a donc fort à faire pour que le tourisme devienne plutôt associé à la création de la richesse et de l’emploi, au développement durable, au respect et à l’intégration des communautés locales dans les projets, à une industrie «à dimension humaine» constituée avant tout de PME locales qui favorisent l’intégration des minorités et qui valorisent le rôle de la femme, à une industrie qui contribue à la diffusion de la culture et de la créativité, etc.

Valorisation du tourisme et de son industrie, de quoi parle-t-on?

Afin d’améliorer sa force de persuasion, l’industrie touristique doit s’assurer d’être un interlocuteur crédible et intègre, de baser son argumentaire sur une information de qualité et de faire preuve d’un réalisme politique dans ses demandes, tout en adoptant une bonne attitude face aux pouvoirs publics et au grand public.

Le défi de la valorisation du tourisme québécois nécessite de bien identifier :

1) l’état de la situation: la réalité du tourisme québécois (contexte et conjoncture) et la perception que le milieu touristique a de lui-même;

2) les publics auxquels le tourisme veut s’adresser: quelles sont les réalités et les perceptions du grand public, des pouvoirs publics, des professionnels, des syndicats, des employés, des médias, des investisseurs, etc.;

3) les aspects du tourisme que le milieu désire valoriser: les produits et les services, les ressources humaines, les métiers et la formation, l’importance économique et les retombées, les structures et les modèles d’affaires, etc.

Une telle réflexion permet ensuite de déterminer plus efficacement les modes d’action envisageables, dont: mobilisation, lutte, gestion, lobby, promotion, sensibilisation, concertation.

Des exemples ailleurs dans le monde

Ici comme ailleurs, lorsqu’il est question de valorisation, les pistes de réflexion et les thématiques récurrentes sont: le branding, le lobbying, l’implication de la population, la formation et la professionnalisation des ressources humaines, la qualité (de l’accueil et des produits), le développement durable et les partenariats avec l’industrie. Voyons comment d’autres nations relèvent le défi.

Gérer le conflit entre développement et environnement (Nouvelle-Zélande)

En février 2005, le gouvernement néo-zélandais, en partenariat avec les professionnels du tourisme, coordonnait la création de chartes environnementales dans six régions. Il créait ensuite un fonds de 1,2M$ destiné à sensibiliser les entreprises touristiques aux bonnes pratiques environnementales. Placé sous la responsabilité du ministère de l’Environnement, ce fonds soutient, au cas par cas, l’implantation de mesures concrètes dans les entreprises et ce, en partenariat avec les corporations et avec le soutien d’experts en environnement.

Stimuler la demande et positionner la destination (Nouvelle-Zélande)

Grâce à un généreux soutien gouvernemental, l’Organisation nationale du tourisme (ONT) a misé sur le country branding afin de favoriser l’émergence d’une image de marque. Cette marque, 100% Pure New Zealand, devait être facilement identifiable, tout en attirant le visiteur idéal. Convaincue qu’on ne peut plaire à tout le monde, l’ONT a ciblé ses efforts afin de séduire le voyageur qui recherche ce que le pays a à offrir, celui qui est le plus rentable et le plus susceptible de passer de longs séjours dans le pays.

Se doter de la meilleure ONT au monde (Australie)

Confiante en la qualité de son produit touristique et convaincue de l’importance des partenariats avec le secteur privé, Tourism Australia multiplie les partenariats privés afin de déployer des actions promotionnelles communes. Pour ce faire, elle dispose d’un budget annuel fixe de 140M$.

L’objectif est simple: en misant sur une connaissance pointue des marchés, présenter une campagne originale qui établit de nouveaux standards dans la promotion des destinations touristiques afin de rejoindre le visiteur idéal, soit celui qui dépense le plus et qui a une prédisposition pour ce que l’Australie a à offrir. Les actions déployées doivent faire en sorte que les clientèles cibles ne fassent pas qu’aimer l’Australie, mais éprouvent vraiment le besoin de s’y rendre.

Améliorer l’accueil? Un choix imposé ou «impliqué»? (France)

Selon diverses consultations menées auprès des clientèles au début des années 1990, le problème numéro un du tourisme en France est celui de l’accueil des visiteurs. Afin de remédier à cette situation, le Secrétariat d’État au tourisme lançait, en 1994, la campagne «Bonjour!», dont l’objectif visait à sensibiliser les intervenants à l’importance de l’accueil. Dix ans plus tard, une étude révélait que la situation persistait (42% des personnes interrogées dans 12 pays considéraient l’accueil comme étant l’un des points faibles du tourisme français).

Devant ces résultats décevants, la France développe une nouvelle approche. Cette fois, plus de 72 000 professionnels du tourisme s’engagent à valoriser le caractère chaleureux et festif du pays. Menée par la Maison de la France, la nouvelle campagne «Bienvenue en France» – qui vise les professionnels – est tout de même présentée au grand public afin d’en faire une réalité à l’échelle nationale. Les efforts des intervenants sont soutenus par la diffusion d’un «livre de l’accueil» qui, grâce à la contribution des 33 bureaux de la Maison de la France à l’étranger, présente brièvement les us et coutumes des visiteurs étrangers et certains mots de bienvenue et de politesse permettant de mieux les recevoir et les servir (voir image ci-dessous).

Reconnaître l’importance du tourisme (Maroc)

Plusieurs régions du monde se sont dotées d’une politique touristique et le Maroc ne fait pas exception. Vision 2010 présente d’ambitieux objectifs, tous partagés par le gouvernement marocain qui a officiellement reconnu l’énorme potentiel de croissance que recèle l’industrie touristique en la situant au premier rang de ses priorités économiques nationales.

Exercer un lobbying multisectoriel (Australie et Europe)

Le milieu des affaires australien souhaitait avoir davantage d’influence sur l’État. Voilà pourquoi il créait, en 1989, le TTF (Tourism & Transport Forum), forum national entièrement financé par ses 200 membres, parmi lesquels figurent les plus prestigieuses corporations d’Australie dans les domaines du tourisme, des transports, de l’immobilier et des infrastructures. Le TTF a notamment réussi, en 2003, à convaincre le gouvernement australien de financer le plan national de développement touristique à la hauteur de 235M$A répartis sur quatre ans.

En Europe, un organisme similaire a été créé en 1995, le Network of European Private Entrepreneurs in the Tourism Sector (NET). Il s’agit d’un réseau informel d’organisations qui représentent des secteurs variés de l’industrie touristique, dont le but est de faire passer un seul message clair auprès des politiciens européens afin d’encourager l’émergence d’un environnement favorable pour le tourisme européen et l’amélioration de l’image du tourisme en tant qu’industrie.

Défi pour l’industrie touristique québécoise

M. Arseneault conclut en rappelant que les occasions d’agir sont nombreuses pour le milieu touristique québécois. Par contre, si elle veut en tirer profit, l’industrie devra abandonner l’attitude de confrontation (eux autres vs nous autres!), croire plus que jamais en sa force et en son potentiel, mieux s’organiser et accepter de s’investir collectivement sur une base continue.

Pour visualiser la présentation de M. Arseneault, cliquer ici.

Source :
Arseneault, Paul. «La valorisation de l’industrie touristique ailleurs dans le monde», conférence, Assises touristiques du Québec 2006, 26 mai 2006.

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