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Analyses - 17 août 2006

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août 2006

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Le tourisme embrasse les causes sociales

Le discours sur la réduction de la pauvreté et une meilleure répartition des richesses sur la planète occupe souvent l’avant-scène. Le tourisme n’y échappe pas et cela prend de multiples traits, allant du pro-poor tourism (tourisme visant à contrer la pauvreté) à des initiatives locales. En fait, l’industrie touristique doit, à juste titre, contribuer au développement des pays dans lesquels elle exerce son activité. Lentement, le développement durable, dans toutes ses dimensions, fait son bonhomme de chemin.

Trop souvent, on associe le concept du tourisme durable à la protection de l’environnement, cette dernière n’étant qu’une pièce du puzzle. Maintenant, les composantes économiques et sociales s’intègrent davantage dans le discours alors que le tourisme durable veut aussi dire un projet viable économiquement, socialement accepté et intégré dans le milieu et qui permet à la population locale de bénéficier des retombées économiques.

Égalité, équité, éthique

Depuis plusieurs années, l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) soutient que le tourisme constitue un excellent vecteur de développement économique dans les pays pauvres, d’unité et de paix dans le monde. Le tourisme international devant presque tripler au cours des deux prochaines décennies, le Code mondial d’éthique du tourisme devient un outil nécessaire pour atténuer les effets négatifs générés par le tourisme et pour mieux définir les règles du jeu pour tous les intervenants concernés. Par ailleurs, l’OMT lançait l’initiative ST-EP (Sustainable Tourism – Eliminating Poverty), à Johannesburg en 2002, visant à encourager le tourisme durable et ainsi lutter contre la pauvreté.

Le pro-poor tourism (PPT) s’insère aussi dans ce courant. Son but est d’accroître les bénéfices pour les pays pauvres principalement situés dans l’hémisphère Sud de la planète. Le PPT représente une approche de développement et de gestion et non pas un produit comme tel. Il consiste aussi à mieux intégrer le touriste dans le milieu visité et à lui faire comprendre son rôle dans le développement des sociétés.

Le développement durable est-il une utopie? À cette interrogation, Andrée-Lise Méthot, présidente-directrice générale du Fonds d’investissement en développement durable et co-présidente du groupe de travail du Programme des Nations Unies pour l’Environnement, répondait: «L’utopie, c’est de penser qu’on peut continuer à consommer comme on le fait, sans qu’il n’y ait aucun impact sur la planète… En 2050, au rythme où nous consommons, il faudra deux planètes pour nous faire vivre…». À cet égard, on critique tant le comportement du consommateur que la responsabilité sociale de l’entreprise à titre de citoyen corporatif.

L’éthique du touriste

Le touriste qui visite une destination devrait être conscient que les voyages perturbent l’environnement et qu’il devrait respecter les contraintes imposées par le milieu visité, ce qui signifie, entre autres:

  • de renoncer à un certain degré de confort si les ressources disponibles sur place ne permettent pas de rencontrer les standards auxquels il est habitué (eau en abondance, électricité à prix abordable, utilisation de l’automobile, etc.);
  • de protéger l’environnement;
  • de prendre le temps de s’imprégner de la culture du pays visité et de la comprendre, de s’intéresser et de respecter les traditions, les coutumes et les modes de vie locaux;
  • d’accorder sa préférence aux produits locaux.

À ce titre, le voyagiste et l’agent de voyages devraient, en tant qu’interlocuteurs privilégiés, sensibiliser le voyageur.

L’éthique de l’entreprise

Il y a longtemps que l’on discute de l’impact d’une entreprise sur la société dans laquelle elle évolue, que ce soit comme acteur économique d’importance, comme source de pollution, comme exploiteur de ressources naturelles sans souci de conservation ou comme abuseur des travailleurs. On exige désormais de l’entreprise qu’elle se comporte comme un bon citoyen. C’est pourquoi on voit de plus en plus les compagnies multiplier leurs actions sociales. Or, les retombées positives réelles se révèlent bien souvent fort décevantes, leur souci étant principalement d’améliorer leur image. Mais il y a un commencement à tout!

Des actions concrètes se multiplient

L’initiative qui a fait couler le plus d’encre est sans nul doute la taxe de solidarité sur les billets d’avion afin d’aider au développement des pays pauvres (financement d’un programme de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose), laquelle est entrée en vigueur en juillet 2006 en France. (Lire aussi: Le tourisme durable fait des vagues)

Afin d’appuyer l’initiative ST-EP, une mise de fonds initiale a été constituée par la SNV Netherlands Development Organisation. Le gouvernement de l’Italie a également apporté sa contribution. Cet argent a permis l’approbation de 29 projets (12 en Afrique, 9 dans les Amériques, 6 en Asie et dans le Pacifique et 2 en Europe).

Plusieurs entreprises ont décidé de s’impliquer dans ce mouvement social. Par exemple, le site CharityHotels.com a vu le jour, à la fin de 2005 aux Pays-Bas, grâce à l’initiative de plusieurs associations humanitaires. Une commission de 5% est versée à un organisme de charité (Croix rouge, Amnistie internationale, World Wildlife Fund, Médecins sans frontières, etc.) pour chaque chambre d’hôtel réservée sur le site (Meridien, Sheraton, Marriott, Accord, Starwood et autres). Le consommateur, pour sa part, effectue un geste charitable en réservant sur ce site sans qu’il lui en coûte un sou supplémentaire.

En juin dernier, les hôtels Delta lançaient à l’échelle canadienne le Défi Delta afin de participer au financement des Jeux olympiques spéciaux du Canada. Pendant 21 jours, les clients étaient invités à débourser 2$ et à résoudre des devinettes. La compagnie Lindt s’est associée au groupe hôtelier pour récompenser les efforts des clients en leur offrant des chocolats mi-amers. D’autres projets parrainés par la société-mère, Fairmont Hotels and Resorts Inc., ont vu le jour, tels que «Adoptez un abri» où Delta fait don de biens réutilisables à des refuges pour femmes ou encore «Un toit pour les Fêtes» où un hébergement de courte durée est offert à des personnes de l’extérieur de la ville qui visitent un membre de leur famille hospitalisé.

Certains hôtels se font plus discrets en participant aux soupes populaires et en aidant les organismes communautaires de leur milieu.

Par ailleurs, une destination a décidé de faire payer les touristes qui profitent de ses attraits. Aux prises avec un taux de chômage élevé, une situation financière difficile et une dette publique importante, le président de la Sardaigne a décidé d’imposer des impôts aux touristes fortunés, lesquels s’appliquent sur les résidences secondaires bordant la côte, sur les arrivées en avion privé et sur les yachts luxueux.

On verra des initiatives de ce genre se multiplier dans les prochaines années. Même si, actuellement, nous sommes engagés dans un mouvement de conscientisation, le courant du tourisme durable est inéluctable et, par la suite, il ne suffira plus de promouvoir son image, mais il importera de poser des gestes qui ont des conséquences sociales, économiques et environnementales positives. C’est une question de conscience, de protection et d’équilibre.

Sources:

– CharityHotels.com [www.charityhotels.com].
– Conseil de l’Europe. «Tourisme et environnement», [www.coe.int/t/f/coop%E9ration_culturelle/environnement/nature_et_diversit%E9_biologique/publications/QR3_tourisme.pdf].
– Cousineau, Marie-Ève. «Le développement durable est-il une utopie?», Commerce, mars 2006, p. 93.
– Delta Hotels. «Good for the Brain. Great for the Heart», Press Releases, [www.deltahotel.com], 5 juin 2006.
– L’Entreprise. «Quand l’hôtellerie vient en aide aux SDF», no 242, février 2006, [www.charityhotels.com].
– Organisation mondiale du tourisme [www.world-tourism.org/step/
index.htm
].
– Pro-Poor Tourism [www.propoortourism.org.uk].
– «Taxer les touristes les plus riches, le grand patron de Sardaigne a osé», [www.sardegnarent.com/news.php].

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