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Analyses - 23 décembre 2011

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décembre 2011

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La concurrence des aéroports frontaliers américains

Les aéroports de Burlington et de Plattsburgh attirent de plus en plus de clients au Québec et dans le sud-est de l’Ontario. Les bas prix sur les billets d’avion ont incité environ 337 000 Canadiens à prendre le départ dans ces deux aéroports en 2010, privant le Québec de recettes touristiques qui auraient dû lui revenir.

Un problème pancanadien

En 2010, un million de Canadiens se sont rendus dans les aéroports frontaliers américains pour prendre l’avion. On prévoit que cette proportion triplera en 2015. Ils sont attirés surtout par les prix des billets et les voyages à rabais. L’écart de prix peut aller jusqu’à 50% par rapport aux prix canadiens. Selon un sondage, les Canadiens réaliseraient une économie de l’ordre de 300 $ par billet d’avion à l’aéroport de Plattsburgh. La nouvelle taxe de 5 $US bientôt imposée par les États-Unis aux passagers qui entrent au pays par air ou par mer favorisera davantage les aéroports frontaliers.

Un rapport du Conference Board du Canada indique que les Canadiens sont prêts à faire jusqu’à quatre heures de route en voiture pour économiser. Un sondage portant sur les intentions de voyage d’hiver 2011-2012 établit que 17,4% de ceux qui planifient un voyage en Floride ont l’intention de se rendre en voiture jusqu’à un aéroport américain pour prendre l’avion. Un autre sondage, cette fois de l’Hotel Association of Canada (HAC), évalue que 21% des Canadiens prétendent s’être rendus aux États-Unis pour prendre l’avion en 2010, comparativement à 18% en 2009.

Le problème est pancanadien. On l’observe à Vancouver, à Calgary, à Windsor, à Toronto et dans les Maritimes. Le Québec n’y échappe pas. Les aéroports de Burlington et de Plattsburgh ciblent avec succès le marché des Québécois qui vont aux États-Unis et dans les destinations soleil.

Une concurrence inquiétante

À Burlington, on estime que 40% des 641 000 passagers embarqués en 2010 sont des Canadiens; à Plattsburgh, ils représentent de 85% à 90% des 95 000 passagers embarqués.

Aéroports de Montréal (ADM) évalue les pertes à 300 000 voyageurs par an. Si l’on se fie aux évaluations de Burlington et de Plattsburgh, la fuite serait plutôt de 337 000 passagers embarqués en 2010. De plus, quand une habitude est prise, elle devient ancrée et répandue.

Burlington stagne

Burlington est le principal aéroport frontalier à proximité du Québec. Situé à 160 km de route de Montréal (2 h), l’aéroport traverse une période difficile; les passagers embarqués en 2010 sont 14,3% moins nombreux qu’en 2008. L’entrée en scène de Plattsburgh est vraisemblablement une des causes de ce déclin (voir tableau 1).

L’orientation actuelle de Burlington favorise les connexions avec les principales plaques tournantes américaines. Les transporteurs Continental Airlines, U.S. Airways, JetBlue Airways et Delta Air Lines y offrent des liaisons vers six grandes villes américaines et deux villes en Irlande. Le tarif journalier du stationnement est fixé à 12 $.

Un article de février 2011 fait état de difficultés financières sérieuses à Burlington. Aucun projet majeur n’est annoncé. Il n’y a donc pas lieu d’anticiper une érosion accrue du marché québécois de ce côté dans l’immédiat.

 

Source: Plattsburg International Airport

Plattsburgh explose

Situé à 105 km (80 min) de Montréal, Plattsburgh est plus près que Burlington du cœur du marché québécois et du sud-est ontarien. En 2007, l’ancien aéroport militaire a été converti en aéroport civil. On le présente comme le U.S. Montreal Airport, confirmant une stratégie de promotion ciblée sur le Québec.

Plattsburgh s’est donné une orientation de destinations resorts. Il couvre 35 villes dans 18 pays. Il compte sur quatre transporteurs: Direct Air, Allegiant Air, U.S Airways et, depuis 2011, Spirit Airlines, qui propose à elle seule 28 destinations dans le sud des États-Unis, aux Antilles et en Amérique latine. Ces compagnies aériennes dites « à rabais » profitent de frais d’aéroports et de taxes inférieurs à ceux de Montréal, du marché de proximité du sud du Québec et d’installations aéroportuaires compétitives et efficaces.

Les consommateurs sont attirés par les tarifs aériens plus bas qu’au Québec. La gratuité du stationnement a été remplacée par des frais de 5 $ et 3 $ par jour, ce qui reste encore nettement moins coûteux qu’à Montréal. On sert les clients en français et en anglais.

De 2008 à 2010, la croissance du nombre de passagers a atteint 106% (voir tableau 1). L’arrivée en 2011 de Spirit Airlines multiplie les options de départ vers les destinations soleil et les pays d’Amérique latine.

 Aéroport international de Plattsburg

Source: Plattsburg International Airport

L’avenir est prometteur. On a prévu 150 000 passagers embarqués en 2011. Laurentian Aerospace réalise un investissement de 175 millions de dollars dans des installations d’entretien et des réparations qui devraient être terminées à la fin de 2012. Un projet d’agrandissement de l’aérogare a été annoncé en septembre 2011.

Des répercussions à ne pas sous-estimer

Les transporteurs aériens canadiens et l’HAC s’inquiètent de la concurrence des aéroports frontaliers. Les répercussions de la tendance actuelle, du comportement des Canadiens en matière de voyage, sont bien réelles sur les dépenses touristiques générées au Canada par les voyages à l’extérieur du pays.

Pour les transporteurs canadiens, ce sont des pertes de ventes de billets ou de forfaits. Pour les aéroports, dont Montréal, c’est un manque à gagner pour les frais d’aéroport, les stationnements, les restaurants et les boutiques sur place. Pour les hôteliers, ce sont des nuitées perdues. Pour les entreprises qui préparent, réparent et ravitaillent les avions, c’est aussi un manque à gagner; même chose pour les stations d’essence, les commerces de détail et les taxis. Pour les gouvernements, ce sont des revenus de taxes qui leur échappent.

On oublie souvent que 11% des recettes touristiques du Québec (1, 211 milliard de dollars canadiens) proviennent des dépenses faites au Québec pour des voyages à l’extérieur du Québec. Les 337 000 départs effectués dans les aéroports frontaliers représentent 8% des voyages transfrontaliers ou internationaux totaux partis des aéroports du Québec. Si, par surcroît, ce nombre va croissant, il apparaît urgent de mesurer l’incidence du phénomène et de chercher des solutions.

Les transporteurs et l’HAC réclament de réduire les frais d’aéroports et les taxes. L’idée mérite d’être considérée. Une telle mesure pourrait réduire l’écart de prix, mais ne suffira probablement pas à contrer la concurrence. On pourrait aussi étudier les possibilités de tirer profit des services offerts par les transporteurs à rabais dans des destinations émergentes ou ayant un certain potentiel pour attirer de nouvelles clientèles au Québec qui passeraient par les aéroports frontaliers.

 

Sources:

– Brain, Ryan. «Uncertain times», Tourism, Hospitality and Leisure update, Deloitte & Touche.

– Cardinal, François. «Exode vers Plattsburgh», LaPresse, 30 novembre 2010.

– Conference Board of Canada. «Industrial Outlook 2011, Canada’s air transportation industry: Industrial Outlook».

– Devau Scott. «More Canadians crossing the boarder to fly», Financial Post, 16 février 2011.

– Kelly, Kevin J. «Airport envy: can PGB (Plattsburgh) compete with BTV (Burlington)», Seven days, 9 février 2011.

– Ministère du Tourisme du Québec, «Tourisme en bref au Québec, 2010».

– Statistique Canada, catalogue 51-203-X 2010.

 

Sites Web:

Plattsburg International Airport

The Air DB

Burlington International Airport

 

Henri Chapdelaine – Consultant senior Union V
Détenteur d’une maîtrise en aménagement du territoire de l’Université d’Ottawa et d’une licence en géographie de l’Université Laval, Henri Chapdelaine a mené une carrière de 36 ans dans les domaines du développement économique et touristique au gouvernement du Québec.S’étant joint au ministère du Tourisme en 1985, il a occupé divers postes d’encadrement, notamment comme directeur général du développement, directeur général de la recherche et de la planification et directeur général des services aux clientèles touristiques. Il a été responsable du développement du système de gestion de la destination BonjourQuébec.com.Depuis sa retraite en 2007, il agit comme consultant senior. En 2011, il fait partie de l’équipe de l’entreprise Vecteur 5 et il a fondé sa propre entreprise de communications, Union V.
  • Alain Trudel

    L’analyse est très juste. j’ai pris l’aéroport de Burlington 4 fois en 2011. TOTALEMENT ENCHANTÉ. J’ai économisé 50% du prix du billet chaque fois. Plus facile de passer les douanes terreste, surtout si vous arrivez à Dorval le dimanche soir, attente de plus de 2 heures cette été , seulement pour passer la douane, les européens étaient consternés. Tout est plus facile à Burlington, on peut arriver 1 heure avant le vol. Pour le stationnement, prenez le coupon de Thrifty sur internet, 9 $ par jour.

    J’aime bien la conclusion de votre article, le Québec doit être plus concurrentiel , baisser les taxes. Si la différence de prix est plus que 10%, je vais continuer d’aller à Burlington. ET, je ne suis pas le seul…

  • Gilbert Guinard

    Citation: “…Continental Airlines, U.S. Airways, JetBlue Airways, Aer Lingus et Delta Air Lines y offrent des liaisons vers six grandes villes américaines…”

    Il est évident que le transporteur irlandais Aer Lingus ne met pas les pieds ou plutôt les roues à BTV. IL s’agit certainement d’une erreur de la rédaction. Selon le site web de BTV, Continental, Jet Blue, United, Delta, US AIrways et Porter sont les lignes aériennes offrant un service à BTV.

    Errare Humanum Est

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