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Analyse - 27 février 2014

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février 2014

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Les hôtels verts: source de confusion pour les consommateurs

De nombreuses statistiques ont beau affirmer que les consommateurs sont intéressés, un point fondamental demeure: l’information sur les hôtels verts n’est pas normalisée, ce qui ne facilite pas la tâche des consommateurs.

Marketing ou relations publiques

Selon Cronin, Smith, Gleim, Ramirez et Martinez (2011), les entreprises doivent élaborer des stratégies de marketing vert pour répondre à la demande du public et déclarent que souscrire au triple résultat leur permet d’accroître leur chiffre d’affaires.

La hausse de la demande en tourisme durable entraîne l’accroissement du marketing vert. Les consommateurs qui veulent faire le «bon» choix sont bombardés d’options écologiques, mais doivent rester prudents et avoir la possibilité de distinguer le tourisme vert de l’«écoblanchiment» («Green wash» ou «green washing»). Dans l’industrie du tourisme, les mentions «vert», «durable» ou «éco» ont fait l’objet d’une attention considérable de la part des hôtels au cours des dernières années, se traduisant par un nombre accru des programmes verts. Ceux-ci prétendent offrir l’efficacité opérationnelle, une économie des coûts, l’adoption des valeurs de l’entreprise par les employés, du marketing et de meilleures relations publiques. La question est de savoir si ces programmes sont efficaces en ce qui concerne le marketing et les relations publiques.

De nombreuses études ont été faites sur le comportement en matière de tourisme durable (voir sustainabletourism.net pour ces études). Par exemple, un sondage fait en 2012 par TripAdvisor a permis de constater que 71% des personnes interrogées feraient des choix écologiques au cours des douze mois subséquents. En 2012, le voyagiste TUI, a appris que 54% des sondés connaissaient très bien la notion de durabilité et que 40% d’entre eux s’y intéressaient. En 2011, 93% des lecteurs du Conde Nast Traveler croyaient que les agences de voyages devraient s’occuper de la protection de l’environnement et 58% d’entre eux ont dit que leur choix de destination était influencé par le soutien qui est apporté à la communauté locale.

Informations confuses

Pour connaître les pratiques des hôtels verts, une étude approfondie du Web a été effectuée entre les mois de septembre et de décembre 2013. Plus de 100 pages de Google ont été analysées à cinq occasions différentes. Parmi les termes utilisés: «Green hotels» («hôtels verts»), «Ecohotels» («écohôtels») et «Sustainable hotels» («hôtels durables»).

Un nombre de divergences découlent des recherches effectuées. Les résultats montrent que certains hôtels qui apparaissent dans Google à la requête «vert» ou «éco» n’adoptent pas vraiment de pratiques «vertes». Un hôtel en Colombie-Britannique s’autoproclamant «centre de villégiature écotouristique», par exemple, est relié au réseau électrique et ses pratiques écologiques les plus importantes sont le recyclage et le compostage.

Il n’existe pas non plus de réel système de classement mondialement reconnu pour les sites «d’hôtels verts». Actuellement, l’industrie touristique possède un bon nombre de programmes de certification et pourtant aucun n’a de masse critique. Par ailleurs, certains programmes qui gagnent du terrain ne figurent pas dans les résultats des moteurs de recherche parce qu’ils ne portent pas les mentions «vert» ou «éco». Tous ces termes, comme «durable», «responsable», «vert», «éco», etc., alimentent la perplexité des membres de l’industrie et des consommateurs.

Les sites Web analysés occupent quatre catégories principales:

1. Des hôtels individuels qui font la promotion de leur propre programme vert. Il s’agit surtout de ceux liés à des groupes hôteliers importants (Kimpton, Marriott, etc.).

2. Des sites Web qui certifient l’aspect écologique des hôtels selon un ensemble de critères précis et leur attribuent une cote. Dans cette catégorie, on trouve:

a. Des organismes qui fournissent des critères précis, quantifiables et détaillés – Clef verte, Green Globe, LEED, ISO 1400, Green Seal, Energy Star, GSTC, et;

b. Des organismes dont les critères sont vagues et difficiles à quantifier – Eco Luxury hotels, Eco hotels of the World, etc.

3. Des sites Web qui proposent des hôtels écologiques en fonction des critères d’autres fournisseurs (Expedia, TripAdvisor).

4. Des sites Web qui donnent des renseignements et des outils pour devenir écologique (souvent des articles de revues conseillant les hôtels sur leur façon de réduire leur empreinte écologique).

La majorité des résultats des recherches sur le Web portaient sur des hôtels écologiques évalués selon des critères d’autres fournisseurs. Par exemple, Eco lodge, Element et Green Tourism contenaient tous des hôtels ayant obtenu la certification LEED, ou qui utilisaient des appareils homologués Energy Star. Dans ce cas, le site Web, plutôt que de certifier les hôtels de façon indépendante, fournissait une liste des hôtels verts évalués selon des systèmes de certification établis. Ces critères étaient presque tous de nature écologique et n’abordaient pas l’impact sur les communautés ou les autres aspects sociaux qui intéressent les consommateurs. D’autres sites Web donnaient des renseignements et des outils aux hôtels ou aux voyageurs pour devenir plus écologiques. Ce sont plutôt des outils de formation et des fournisseurs de services en matière de mise en œuvre de solutions durables qui étaient proposés dans ce cas.

Conclusions

De ces recherches, nous pouvons tirer deux conclusions. D’abord, de nombreuses prétentions de «durabilité» ne sont en fait que de l’«écoblanchiment». Ce terme qui désigne des tactiques de marketing (affirmations mensongères ou exagérées) utilisées par des entreprises pour donner l’impression qu’elles sont vertes[1]. L’objectif principal de ce stratagème marketing est de convaincre les consommateurs que les entreprises, ou les hôtels dans ce cas, mettent en œuvre des initiatives durables, même si c’est faux. Aujourd’hui, la sensibilisation des consommateurs se limite surtout au lavage des serviettes et les hôtels tardent à aborder des sujets tels que les déchets, l’électricité, le chauffage/la climatisation ou les éléments sociaux et communautaires.

Ensuite, il est manifeste que les valeurs écologiques s’imposent. Bien que les renseignements soient difficiles à comprendre – ils sont beaucoup plus nombreux. Le fait que TripAdvisor offre un classement «vert» peut être bénéfique parce qu’il possède assez d’influence pour forcer les hôtels à améliorer la qualité de leurs services ou de tout autre élément dont se plaignent les voyageurs. Plus de 40 millions de personnes accèdent à TripAdvisor par mois, ce qui porte à croire qu’il peut inciter les consommateurs à faire des choix plus durables. Malheureusement, il ne cote les hôtels qu’en fonction de critères environnementaux et délaisse les critères sociaux. Ce qui est regrettable, étant donné que bon nombre de voyageurs veulent savoir ce que fait l’hôtel pour la communauté locale.  

L’idée de profiter des retombées du voyage écologique peut sembler attrayante, toutefois, l’information qui s’y rapporte actuellement n’aide pas les consommateurs à faire des choix éclairés. Les hôtels ne devraient pas seulement se contenter d’utiliser les programmes verts comme moyen d’attirer les consommateurs. Ces programmes servent également à améliorer l’efficacité opérationnelle, à réduire les coûts ainsi qu’à attirer, à retenir et à inspirer les employés. Leur mise en œuvre en vaut la peine, même si le marketing ne fonctionne pas.

Si l’industrie du tourisme désire vraiment inciter les consommateurs à faire des choix «verts», elle doit tenir compte des éléments clés suivants:

  1. Les sites Web devraient être transparents pour permettre aux consommateurs de déterminer ce qui est réellement écologique.
  2. Un seul site Web principal regroupant tous les hôtels «verts» devrait être créé afin de simplifier les recherches.
  3. Les critères d’évaluation devraient être les mêmes standardisés pour faciliter leur compréhension.

[1] Le terme a été utilisé pour la première fois par l’écologiste Jay Westerveld lorsqu’il s’est opposé aux hôteliers qui plaçaient dans les chambres des avis demandant aux clients de réutiliser leurs serviettes pour «sauver la planète». En réalité, cette initiative était plutôt motivée par la réduction des coûts liée au fait de laver moins de serviettes (Motavalli, 2011).

En collaboration avec Julie Ellefsen

Collaboration

Rachel Dodds

Professeure, Ted Rogers School of Hospitality & Tourism Management, Ryerson University

Rachel Dodds est reconnue à travers le monde en tant qu’experte du tourisme durable. Elle est professeure à la Ted Rogers School of Hospitality and Tourism Management à l’Université de Ryerson [...]Lire pluset directrice de la firme de consultants Sustaining Tourism. Elle est l’auteure des livres “Power and Politics” et “Sustainable Tourism in Islands”. Ses champs d’expertise se concentrent sur le tourisme durable, les changements climatiques et la responsabilité sociale des entreprises. Elle est titulaire d’un Ph.D. de l’Université de Surrey en Angleterre et d’une Maîtrise en gestion du tourisme de l’université de Griffith en Australie. Elle est membre fondatrice de la Canada’s Icarus Foundation, participe au Sustainability Council for the Tourism Industry Association et est ex-membre de la Travel and Tourism Research Association of Canada. Elle a vécu et travaillé sur quatre continents et a voyagé dans plus de 75 pays.

Site de l’institution : http://www.ryerson.ca/htmresearch/research_faculty/rachel_dodds.html

Source(s)

- Cronin, J.J, Jr., Smith, J.S., Gleim, M. R., Ramirez, E., Martinez, J.D., (2011) Green Marketing Strategies: An examination of stakeholders and the opportunities they present. Journal of Academic Marketing Science. 39. Pp158-174

- Motavalli, J. (2011) A History of Greenwashing: How Dirty Towels Impacted the Green Movement. Last accessed Dec 2, 2013 from  http://www.dailyfinance.com/2011/02/12/the-history-of-greenwashing-how-dirty-towels-impacted-the-green/

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