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Analyses - 13 décembre 2004

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décembre 2004

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La motoneige en harmonie: deux exemples de réussite

La gestion de la cohabitation entre les utilisateurs de véhicules récréatifs, les adeptes de plein air et les propriétaires habitant à proximité relève du défi. Nous avons identifié deux exemples intéressants à l’étranger qui sont susceptibles d’inspirer de nouvelles pistes de solution. Dans les deux cas, le fait d’intégrer l’avis des propriétaires terriens dans le modèle de gouvernance a permis de sauvegarder les acquis et de favoriser un développement harmonieux de la pratique de la motoneige.

La coordination simultanée d’un usage multifonctionnel des espaces récréatifs nécessite une planification minutieuse. Dans un souci de développement durable, il est impératif d’obtenir une reconnaissance des communautés locales et même leur participation au processus.

Le cas de Funäsdalen en Suède

Dans le nord de la Suède, la région de Funäsdalen s’est attaquée aux conflits entre les motoneigistes, les résidants et les adeptes de ski de fond. Les décideurs locaux ont formé une coalition regroupant les différents groupes d’intérêts. Ces derniers sont représentés par une corporation privée (à but lucratif), Funäsdalsfjällen Skoterled AB, qui gère les contrats pour les droits de passage, la tarification pour l’usage des sentiers, ainsi que le zonage.

Il s’agit d’une première en Europe, d’autant plus que certaines destinations hésitent de plus en plus à promouvoir la pratique touristique de la motoneige. Les autorités du comté de Jämtland parient qu’une fois les conflits entre usagers réglés de façon définitive, les investissements consentis se traduiront par des retombées économiques positives.

Mentionnons qu’il s’agit d’une initiative qui s’insère dans un programme plus large, financé par l’Union européenne et le ministère de l’Environnement de la Suède (7,5 millions couronnes, soit 1,35 million $), qui vise à créer un espace terrestre prônant le développement durable. La corporation s’est dotée d’une vision et d’un plan d’action à long terme où amants de la nature et amateurs de motoneige pratiquent leurs activités respectives en toute collaboration. Ses actions visent notamment à isoler les circuits de motoneige des pistes de ski de fond et à adopter un zonage qui respecte les préoccupations écologiques.

La corporation est détenue à 51% par l’association représentant les propriétaires terriens. Les clubs de motoneigistes et les entreprises touristiques figurent quant à eux comme actionnaires minoritaires. Le rôle de la coalition consiste à collecter les frais d’utilisation du réseau auprès des usagers et à gérer l’entretien et la surveillance des sentiers.

Pour assurer la pérennité des 450 km de sentiers, des contrats à long terme sont signés avec les propriétaires concernés. Selon Sven-Erik Hammar, un des responsables du projet, les ententes consistent en des contrats renouvelables de cinq ans. Les propriétaires reçoivent des redevances de 0,30 couronne (environ 0,05$) par mètre de sentier de motoneige traversant leur terrain. Un total de 120 000 couronnes (22 000$) ont été versées aux 380 propriétaires concernés par le programme. Comme incitatif additionnel, ces derniers obtiennent un tarif préférentiel pour l’achat de leur droit annuel d’accès au réseau de sentiers, 250 couronnes (45$) au lieu du tarif régulier de 800 couronnes (144$).

Cette initiative permet, non seulement de renforcer la démocratie locale en responsabilisant les différents groupes d’intérêts, mais surtout, de légitimer les actions entreprises pour améliorer ce secteur d’activité. Il s’agit d’un modèle innovateur de gouvernance qui a été remarqué par les régions voisines. Deux autres comtés suédois planchent actuellement sur un modèle similaire.

Le cas du Maine aux États-Unis

L’État du Maine constitue un autre exemple intéressant. Le réseau mis en place comporte plus de 20 000 km de sentiers. Environ 4000 km s’insèrent à l’intérieur de l’Interconnected Trail System (ITS), qui joue le rôle «d’autoroute» reliant le circuit local aux réseaux voisins du New Hampshire et du Canada. La Maine Snowmobile Association regroupe 280 clubs de motoneigistes et plus de 15 000 membres payant des cotisations d’utilisateurs. L’industrie de la motoneige contribue pour plus de 300 millions $US à l’économie du Maine selon un groupe de travail formé par le gouverneur John Baldacci. Précisons que 94% du réseau de sentiers se situe sur des terres privées.

C’est au cours des années 70 que les propriétaires terriens ont commencé à manifester leur mécontentement à l’endroit des motoneigistes. Le Department of Conservation (DOC) a alors reçu le mandat de trouver des solutions permanentes à ce conflit. La stratégie retenue: créer des incitatifs pour encourager les motoneigistes à s’organiser et les propriétaires à accepter de négocier des droits de passage.

Pour les motoneigistes, le principal gain, c’est de bénéficier d’un réseau de sentiers intégré de haute qualité, financé majoritairement par une ristourne sur les taxes de l’essence. Quant aux propriétaires concernés, ils ne reçoivent aucune compensation financière directe liée aux droits de passage, mais obtiennent en contrepartie la haute main sur l’emplacement des sentiers. Ils sont dégagés de toute responsabilité légale et, surtout, ils gèrent l’application d’une pratique responsable de la motoneige. Le gouvernement a renforcé le tout à l’aide de campagnes de sensibilisation à l’endroit des motoneigistes, leur rappelant l’importance d’une conduite sécuritaire et d’une reconnaissance à l’endroit des propriétaires terriens.

Le facteur clé de la réussite de la solution instaurée au Maine s’est traduit par le programme Trail Grant. Ce dernier permet de verser aux clubs de motoneige les revenus provenant de la vente des droits d’immatriculation des motoneiges, bonifiés de 0,9045% du total des taxes perçues par l’État sur les ventes d’essence attribuables à la motoneige. Les clubs contribuent par l’apport de leurs bénévoles et les revenus de membership. Instauré en 1986, ce fond spécial s’est apprécié de manière impressionnante, passant de revenus annuels de 286 000$US à 1,8 million $US en 2000.

Le DOC, qui gère le programme Trail Grant, n’accordera toutefois aucune subvention aux clubs de motoneigistes qui n’obtiennent pas tous les accords nécessaires des propriétaires terriens. De plus, cette source de financement peut être retirée advenant le cas où un club ne parvient pas à résoudre ses conflits avec des propriétaires. Ces derniers, rassurés, savent qu’ils peuvent aisément obtenir gain de cause en cas de litige. Avec le temps et l’appui du DOC, l’image de la motoneige s’est grandement améliorée auprès de la population, des élus municipaux et des législateurs. Les motoneigistes sont désormais davantage perçus comme des voisins responsables et non comme une menace.

Il faut toutefois préciser que le modèle du Maine est confronté à de nouvelles réalités qui compliquent les choses. Au cours des dernières années, la forte croissance du nombre de quadistes circulant sur les mêmes territoires, et les dommages qu’ils causent, soulèvent la grogne des propriétaires. Ces nouveaux venus sont beaucoup plus difficiles à contrôler et peu se limitent aux sentiers balisés.

Pour éviter de mettre en péril le modèle adopté pour la pratique de la motoneige, le gouvernement s’est également attaqué aux problèmes causés par les quads. L’objectif premier: restaurer la confiance rudement mise à l’épreuve par une pratique mal encadrée du quad tout en sauvegardant l’accès privilégié par les véhicules récréatifs aux espaces privés.

Un plan d’action détaillé, approuvé tant par l’association des motoneigistes que par celle des quadistes et une majorité des propriétaires, a été déposé en décembre 2003 par le gouverneur John Baldacci. À l’instar de la motoneige, les quadistes comptent désormais sur leur programme ATV Trail Grant.

Une série de mesures législatives sont progressivement entrées en vigueur au cours de l’année 2004. Par exemple, depuis le 31 août 2004, une loi stipule que la libre circulation d’un quad sur les terres privées constitue un privilège et nécessite une autorisation écrite du propriétaire. Une violation des droits de passage entraînera des amendes variant de 100 à 500$. On s’attend à ce que la contribution des quadistes injecte 2,65 millions $US additionnels à l’ensemble du programme des véhicules récréatifs.

Voir aussi

Funäsdalen
Jämtland

Sources:
– ATV Task Force. «ATV Solutions – Recommendations of Gov. John Baldacci’s ATV Task Force» [www.state.me.us/ifw/pdf/atvfinalreport.pdf], 19 décembre 2003.
– Anttila, Sten et Charlotta Stern. «The voluntary provision of snowmobile trails on private land in Sweden», Document présenté au Swedish Sociological Association Meeting, Uppsala, 25-26 janvier 2001.
– Scruggs, Roberta. «Landowner Relations – A Practical Guide to Preserving Public Access to Private Land», [www.samcef.org/land_owner_guide.pdf].
– Heldt, Tobias et David Vail. «Governing snowmobilers in multiple-use landscapes: Swedish and maine (USA) cases», Ecological Economics [www.sciencedirect.com], No. 48, 2004.
– Vail, David. «Snowmobiling in Maine: Past Successes, Future Challenges», Maine Policy Review [www.umaine.edu/mcsc/mpr/vol11no2/Vail.pdf], 2002.
– Norton, Patrick. «Commission to Study Equity in the Distribution of Gas Tax Revenues Attribuable to Snowmobiles, All-terrain Vehicules and Watercraft», State of maine 120th Legislature, décembre 2001.
– Hultkrantz, Lars et Reza Mortazavi. «Landowner participation in the regulation of outdoor recreation: some problems in snowmobiling regulation», Centre for Research on Transportation and Society, Dalarna University, Tourism Economics, no. 4, 1998.
– «Härliga Härjedalen har Europas bästa skoterledsområde!», Snowmobile No.2, 2001.

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