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Analyses - 22 mai 2005

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mai 2005

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Les seniors sont-ils vraiment des touristes différents des autres?

Avec raison, l’industrie touristique suit de près l’évolution du marché des «baby-boomers». Or, cette population vieillit et se classe progressivement dans la famille des «seniors», lesquels présentent un intérêt indéniable; mais encore faut-il savoir les courtiser. Pour cela, on doit d’abord se demander si les clients plus âgés adoptent un comportement particulier. Or, on se rend vite compte qu’ils ne forment pas un bloc monolithique et que certains segments s’avèrent plus intéressants à cibler que d’autres.

Pourquoi s’intéresser au marché des seniors?

La démographie constitue l’une des rares variables pour lesquelles on peut tracer des perspectives assez fiables. Voici quelques données à considérer à propos du marché des seniors (+ de 50 ans):

  • à toutes les 8,4 secondes, aux États-Unis, un baby-boomer devient un senior; 
  • une personne née en 1950 vivra 20 ans de plus que celle née en 1900;
  • en 2025, 63 millions d’Américains auront plus de 65 ans;
  • la Floride abrite la plus forte concentration de gens de plus de 65 ans et cela se poursuivra jusqu’en 2025;
  • en France, plus de 16 millions de personnes, soit 30% de la population, seront âgées de plus de 60 ans en 2025;  
  • compte tenu de l’évolution démographique actuelle, on recensera bientôt davantage de grands-parents que de jeunes; 
  • en moyenne, les seniors dépensent plus que tout autre segment de population pour plusieurs produits de consommation, dont les voyages; 
  • en 2001, déjà plus de la moitié des Américains âgés de 50 à 64 ans étaient «branchés» sur Internet.

William S. Reece, de la West Virginia University, a étudié la clientèle des seniors en évaluant individuellement certaines variables sociodémographiques susceptibles de produire une influence, négative ou positive, sur la propension à voyager (graphique 1). Il a réalisé l’exercice pour un échantillon de touristes seniors américains dont la moyenne d’âge équivalait à 69 ans et un autre groupe dont l’âge moyen se situait à 40 ans.

Ce que l’on doit comprendre, c’est que des variables exercent, à des degrés différents, une influence sur la propension à voyager des personnes âgées. L’étude démontre que pour certaines catégories d’individus répondant à une variable déterminée, la disposition à voyager peut différer. Ainsi, les personnes de 40 ans possédant un revenu de ménage de 75 000 à 100 000$ sont plus susceptibles d’effectuer un voyage que les seniors de la même classe de revenus.

L’échelle du graphique permet de graduer la force d’influence de chacun des facteurs. La zone orangée (+ de 1,96) représente le seuil à partir duquel les variables revêtent une différence significative. On remarque que seulement deux critères franchissent cette zone: la distance de la destination par rapport au lieu de résidence, de même que le fait de vivre dans une maison. Ainsi, en fonction de ces variables, les personnes âgées affichent une propension à voyager réellement supérieure à celle des individus de 40 ans. Ceci peut s’expliquer par le fait que les consommateurs plus âgés sont habituellement libérés de la plupart de leurs obligations financières. À preuve: environ 80% des Américains de plus de 65 ans possèdent une maison et, pour 80% d’entre eux, la propriété est libre de toute dette. Quant aux autres critères, les écarts observés ne s’avèrent pas suffisamment importants pour être jugés significatifs.

L’auteur de l’étude rejette l’idée que le comportement touristique des seniors s’apparente à celui des autres voyageurs. Toutefois, les différences demeurent beaucoup moins considérables que celles qu’on pouvait attendre. Les résultats démontrent néanmoins que les personnes âgées voyagent plus loin que la moyenne.

Ce que les jeunes seniors ne sont pas

L’âge des baby-boomers varie de 40 à 60 ans. Parmi eux, ceux qui franchissent le cap de la cinquantaine sont qualifiés de jeunes seniors. Même s’ils affichent une propension à voyager somme toute comparable à celle des autres, les raisons pour le faire s’avèrent, elles, bien différentes. Selon Lalia Rach, du Tisch Center for Hospitality, il faut bien connaître les nouvelles réalités propres aux personnes âgées pour comprendre leur influence sur l’industrie touristique.

La nouvelle génération de personnes de plus de 50 ans est née dans les années 1950 et a connu la révolution des années 1960, où les valeurs sociales ont beaucoup évolué. Résultat: ce segment de consommateurs ne se conforme pas au stéréotype de la personne âgée qui demeure chez soi.

Néanmoins, certains mythes erronés à propos des seniors persistent:

  • ils sont «cimentés» à une marque;
  • ils ne sont pas à l’aise avec la technologie;
  • ils privilégient une certaine structure (ex.: voyager en groupes organisés);
  • ils recherchent des activités dédiées aux personnes âgées;
  • ils prennent leur retraite à 65 ans;
  • ils adoptent un train de vie ralenti.

Ce qu’est le jeune senior

Toutes les vieilles prémisses ne tiennent plus. Le senior de 50 ans se définit davantage comme:

  • hautement éduqué;
  • autonome dans tous les aspects de la vie;
  • vivant une forme de revitalisation personnelle;
  • possédant un rythme de vie effréné;
  • vivant sans compromis;
  • adorant réaliser des choix;
  • possédant une soif de connaissances.

Quelles stratégies?

Les touristes de plus de 50 ans sont maintenant plus aventureux que jamais. Selon une étude de la société NOP World menée auprès des Britanniques, les seniors évitent les vacances traditionnelles sur la plage et optent pour des destinations éloignées. Environ 65% voudraient par exemple participer à un safari. L’enquête révèle également que deux tiers des gens de plus de 50 ans estiment jouir pleinement de leur vie. Les produits touristiques et les stratégies marketing doivent tenir compte de cette réalité.

C’est ce que certaines industries ont réalisé en proposant des équipements novateurs, afin de permettre aux personnes âgées de pratiquer leur sport plus longtemps. Les skieurs peuvent ainsi compter sur une botte «molle» (photo) beaucoup plus confortable, et les golfeurs sur des bâtons de type «Big Bertha» (photo) leur permettant de frapper droit et loin sans trop d’efforts.

  

Les messages publicitaires ne s’adaptent pas toujours au portrait sociodémographique des baby-boomers vieillissants (ex.: plus de 31% d’entre eux ne sont pas mariés). Les destinations ne doivent pas craindre d’inclure des personnes âgées rayonnantes dans leurs publicités. Les seniors se sentent jeunes et veulent se reconnaître avant de consommer un produit. Quelque 63% des baby-boomers affirment se sentir plus jeunes que leur âge réel.

Pour obtenir du succès avec cette clientèle, voici quelques recommandations:

  • leur offrir de la simplicité… originale;
  • leur proposer une activité que les autres ne peuvent ou ne veulent pas réaliser;
  • ne pas tenter de les catégoriser;
  • leur permettre de s’impliquer;
  • leur offrir une expérience, pas un produit;
  • les guider, ne pas les encadrer;
  • prévoir des périodes de rafraîchissement et de repos.

Les messages publicitaires à leur intention exigent également une certaine subtilité afin de les interpeller et de les intéresser, sans toutefois les confiner et les catégoriser. Ils ne désirent surtout pas «passer» pour un vieux ou une vieille, ni pour une machine à consommer. Voici quelques mots ou expressions à éviter en s’adressant aux nouveaux seniors: âgés, âge d’or, vieux, têtes blanches, touristes gris, retraités, seniors, etc.

Les entreprises doivent ajuster leurs concepts. Les rabais consentis en fonction de l’âge peuvent demeurer, mais il s’avère préférable d’éviter de catégoriser la clientèle. Parler d’un prix spécial pour les plus de 60 ans plutôt que pour la clientèle de l’âge d’or. Une question doit toujours demeurer à l’esprit du gestionnaire: lequel de mes produits ou services pourrait devenir désuet face à une clientèle vieillissante?

Sources: 
– Direction du Tourisme de France – Département de la Stratégie, de la Prospective, de l’Évaluation et des Statistiques. «Les pratiques touristiques des seniors en 2003», octobre 2004.
– Littrell, Mary A., Rosalind C. Paige et Kun Song. «Senior travellers: Tourism activities and shopping behaviours», Journal of Vacation Marketing, vol. 10, no 4, 12 mai 2004.
– Outburst Advertising/Marketing News. «Why Target the Senior Market?», octobre 2004.
– Rach, Lalia. «The Aging Society: Realities and Perspectives Impacting the Travel Industry», 18th Annual Governors Conference on Travel & Tourism, 29-30 mars 2005.
– Reece, William S. «Are Senior Leisure Traveler Different?», Journal of Travel Research, vol. 43, août 2004.

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