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Analyses - 27 juillet 2006

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juillet 2006

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La «ville ludique»: nouvelle destination touristique

Vers la fin des années 1980, on nous prédisait la «société des loisirs». D’aucuns diront que nous l’attendons toujours, mais le fait est que le nombre d’heures attribuées aux loisirs présente une constante évolution. Voyons comment cela influence le tourisme et l’urbanisme des grands centres.

Société des loisirs: mythe ou réalité?

Selon Gilles Pronovost, ancien professeur de sociologie à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), le temps de travail a diminué depuis les 40 dernières années, au profit des loisirs.

En effet, Statistique Canada affirme que, de 1986 à 1998, le nombre d’heures consacrées par semaine aux sorties et aux activités entre amis a doublé, passant de 5,2 à 10,8. Quant aux dépenses de divertissement et de loisirs, elles ont augmenté de 26,8% de 1997 à 2002. En 2002-2003, le ménage canadien moyen y a consacré près de 6% de ses dépenses totales.

Mais à quoi, en général, emploie-t-on ces précieuses minutes de loisirs? En voici un aperçu:

  • à des activités intérieures, comme écouter la télévision ou la radio, naviguer sur Internet, etc.;
  • à des activités sportives et de plein air, telles que la marche, le ski, etc.;
  • à des activités culturelles, du genre aller au cinéma, au ciné-parc et dans les festivals, visiter des musées, etc.

Le jeu de hasard (tous types confondus, incluant la loterie) constitue aussi une sorte de divertissement. En 2003, près des trois quarts des ménages canadiens ont dépensé de l’argent au jeu.

Remodélisation urbaine

Si la ville devient une «destination touristique» en soi (pour le tourisme ou les loisirs), cela implique un remodelage urbain, esthétique et fonctionnel, et ce, de jour comme de nuit, tout au long des saisons.

Depuis les années 1980, les villes tendent donc à se mettre en scène, voire à devenir elles-mêmes des scènes sur lesquelles se déroulent des divertissements, véritables happenings.

Voici comment elles s’y prennent en ce qui concerne les activités (offre intégrée):

  • elles organisent des festivals, des défilés, des parades et autres festivités de rue;
  • elles globalisent l’offre muséale et valorisent les monuments et sites historiques;
  • elles mettent sur pied de grands événements sportifs, d’où la construction ou l’aménagement de stades et salles omnisports;
  • elles présentent des spectacles – théâtre, opéra, cinéma ou danse;
  • elles créent une identité spécifique forte;
  • etc.

En ce qui a trait à l’architecture:

  • elles aménagent des lieux publics par la création de nouveaux espaces s’adressant essentiellement à une clientèle régionale ou de proximité, qui viendra surtout en fin de journée pour dîner, faire du magasinage, flâner, aller au cinéma ou aller à la discothèque (lire aussi: Les Lifestyles Centers, ou les centres-villes réinventés);
  • elles créent des «enclaves ludiques», de type multiplexe, miniparc à thème, casinos, etc. Ces «terrains de jeu urbains» peuvent également être intégrés à des centres commerciaux existants (lire aussi: Les parcs à thèmes en Amérique du Nord: maturation, consolidation et diversification);
  • elles développent des zones piétonnes;
  • elles offrent des logements diversifiés;
  • elles mettent sur pied des itinéraires touristico-urbains, qu’ils soient de nature culturelle, gastronomique ou même sportive;
  • elles modernisent le mobilier urbain, par exemple, par l’installation dans les aires de repos de bancs et de poubelles en nombre suffisant;
  • elles valorisent le patrimoine bâti;
  • etc.

En regard des infrastructures:

  • elles améliorent l’offre de stationnement et les transports afin d’intégrer mobilité touristique et non touristique, développement de circulation «douce» (métro, pistes cyclables), etc.;
  • elles sécurisent les quartiers par l’aménagement d’éclairages publics, la sensibilisation à la propreté des lieux, l’aide aux quartiers pauvres et défavorisés;
  • etc.

La «ville ludique» est née. Il faut qu’elle soit riche, animée, festive, récréative et créative! Car, comme le précise si bien le journaliste André Désiront, l’«expérience touristique» n’est-elle pas la somme d’activités diverses qui, additionnées, donnent l’impression d’avoir bien rempli son temps?

Profession: esthéticienne de ville

La revitalisation des villes passe par leur «esthétisation». Dans certaines grandes villes américaines, anglaises, et de manière croissante, d’Europe continentale, on recourt de plus en plus aux services de spécialistes ou de médiateurs urbains. Apparaissent dès lors de nouvelles professions.

En France, à Apt, dans le Vaucluse, la Ville a créé le poste d’«esthéticienne de ville». La personne chargée de cette fonction s’occupe principalement de signalisation urbaine, d’aménagement des places et jardins, des vitrines de magasins, du mobilier urbain, de la propreté, etc.

Mais attention, cette activité est complexe. N’y a-t-il pas un risque de voir la ville devenir un espace de loisirs de consommation au détriment du cadre social de ses habitants?

Sources:
– Cloutier, Laurier. «Les centres-villes ont de l’avenir dans le tourisme», La Presse, 29 avril 2005.
– Désiront, André. «Pourquoi va-t-on à Las Vegas?», La Presse, 27 juillet 2005.
– ETC/WTO. «City Tourism and Culture: The European Experience. A Report produced for the Research Group of the European Travel Commission (ETC) and for the World Tourism Organization (WTO) by LAgroup & Interarts», février 2005.
– Fainstein, Susan S. et Robert James Stokes. «Spaces for Play: The Impacts of Entertainment Development on New York City», Economic Development Quarterly, mai 1998, vol. 12, no 2, p. 150-165.
– Gravari-Barbas, Maria. «Les nouveaux loisirs créent-ils un nouvel urbanisme?», ESTHUA – Université d’Angers (France), 2001.
– Lebos, Sonja. «City as a (touristic) product», Journal of Tourism & Cultural Heritage, janvier 2005.
– Marsan, Sébastien. «Tout à loisir», Jobboom Magazine, du 15 novembre 2004 au 15 janvier 2005.
– Souther, J. Mark. «Landscapes of Leisure: Building an Urban History of Tourism», Journal of Urban History, janvier 2004, vol. 30, no 2, p. 257-265.

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