Volontourisme : un emballement pour les déchets

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Stéphanie Massé Stéphanie Massé

L’attention médiatique sur l’abondance des déchets nuisibles trouve un écho dans l’industrie du volontourisme. Des organisations à travers le monde offrent des activités de collecte de rebuts. Des plongeurs aux randonneurs, les grands nettoyages séduisent plusieurs marchés et attirent les millénariaux.

Le mot volontourisme est formée de la contraction de « volontariat » et de « tourisme », et fait référence au jumelage de quelques heures de bénévolats aux vacances. Les activités bénévoles visent des retombées sociales ou environnementales positives sur la communauté locale de la destination. Parmi les activités connues se trouvent la préparation de repas dans les écoles et les orphelinats, l’agriculture, ou encore l’enseignement d’une langue.

Cette pratique de voyage, bien qu’elle soit louable, n’est pas épargnée par les critiques. Durant la dernière décennie, plusieurs études ont démontré les effets « stigmatisants » de l’image de la pauvreté via par exemple les égoportraits de touristes auprès d’enfants de pays en développement. Le manque de compétences des volontaires paraît aussi en tête de liste. Ces reproches se fondent sur le caractère superficiel des projets et sur la mauvaise gestion de leurs réels impacts sur les communautés locales.

Néanmoins, cette industrie aujourd’hui multimilliardaire n’est pas près de s’éteindre. Selon une étude de Marriott Rewards Credit Card, en 2015, 84 % des millénariaux ont déclaré vouloir participer à des activités bénévoles durant leur voyage. Ceux-ci aiment davantage le volontourisme que leurs prédécesseurs, et cette tendance devrait s’amplifier dans l’avenir.

Une nouvelle tendance

Faisant face à plusieurs critiques et à une demande croissante, le volontourisme évolue. Une nouvelle tendance émerge : la collecte de déchets. Cette pratique, dont l’objectif est de retirer les rebuts nuisibles à l’environnement, s’étend au-delà des frontières des pays du sud, jusqu’aux villes industrialisées. Les grands nettoyages gagnent en popularité partout sur le globe.

Le 23 février 2017, les Nations unies « déclarent la guerre » au plastique dans les océans et visent l’élimination du microplastique et du plastique à usage unique d’ici 2022. Le 15 septembre 2018, le World Cleanup Day, la première journée mondiale de collecte de déchets, rassemble plus de 18 millions de personnes dans 157 pays. Ces initiatives semblent donner quelques idées originales à des entreprises touristiques de tous les horizons.

En mer

À la suite du tollé médiatique suscité par la multitude de débris en mer, plusieurs s’immiscent dans la problématique. Avec Project Aware, les plongeurs de partout sur la planète peuvent admirer la beauté des fonds marins tout en collectant les déchets trouvés. Une des initiatives de l’organisation, Dive Against Debris, invite les amateurs à se procurer un sac en filet et des gants arborant son logo pour nettoyer leur environnement. À ce jour, plus de 50 000 plongeurs de 114 pays y ont participé.

À Amsterdam, la compagnie Plastic Whale transforme des excursions nautiques en activité de pêche. À bord d’un bateau, une dizaine de touristes munis de filets et de cannes à pêche espèrent prendre à leur hameçon le plus de déchets possible. Plastic Whale fabrique ses embarcations à partir des prises annuelles et fait construire des meubles avec les matières restantes. Cette activité contribue à l’acceptabilité sociale du tourisme dans la ville et génère des retombées environnementales positives pour la communauté locale.

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Source : Plastic Whale

D’autres organisations conduisent leurs bateaux jusqu’à des berges plus lointaines, ensevelies d’objets abandonnés. C’est une promesse d’aventure qu’offre la fondation canadienne Ocean Legacy avec ses populaires Cleanup Expeditions, partout sur le globe. L’accès privilégié à de magnifiques endroits reculés est attrayant pour les clients. L’organisme a déjà amassé plus de 68 000 kg de déchets.

L’initiative 4Ocean, fondée par deux Californiens, organise des collectes massives en bordure des plages. Les fondateurs rassemblent la communauté de surfeurs et fabriquent des produits promotionnels à partir du plastique trouvé sur les berges. La vente de bracelets et de bouteilles représentant des espèces menacées leur fournit une autre source de financement.

Sur terre

L’organisme GoEco élève le niveau de l’offre avec de longs séjours (de 1 à 12 semaines) axés sur l’entretien des milieux protégés. GoEco a reçu une mention honorable pour une activité aux îles Galapagos, où chaque jour, les participants expérimentent un avant-midi de nettoyage et un après-midi d’activités. Avec des partenaires locaux, My Green Trip propose des expériences similaires, qui mêlent plaisir et corvées.

En montagne, l’organisme High Altitude Mountain Cleaners, fondé par un alpiniste québécois, invite les randonneurs à collecter les déchets durant leur ascension. Même si les pratiquants de plein air portent attention à la protection de la nature, nombreux sont les bombonnes de propane vides ou les emballages de barres énergétiques trouvés par les excursionnistes aux abords des sentiers. Avec le mot-clic #ClimbItButCleanIt, l’objectif n’est plus de laisser sa trace au sommet, mais de nettoyer celles des autres.

En ville

Le plogging, qui vient du mot suédois plocka upp (qui signifie ramasser) et du mot jogging, consiste à mettre dans un sac des débris trouvés durant une course à pied. Des organismes comme GoPlogging invitent les coureurs à se regrouper pour nettoyer des quartiers londoniens. Ces initiatives gagnent en popularité en milieux urbains. En 2019, Marseille accueillera la première compétition de ramassage de déchets en Europe. 

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Source : Pexels, Daria Shevtsova

Au Québec

Bien que l’offre de grands nettoyages ne soit pas encore développée au Québec, quelques initiatives témoignent d’un bourgeonnement récent. Le programme « Ma propre plage » de Stratégies Saint-Laurent invite les membres de la communauté à entretenir les plages près de chez eux. L’organisme Ciel et Terre propose également des collectes annuelles en bordure du Saint-Laurent. Des partenariats avec de tels organismes pourraient bénéficier à l’industrie touristique québécoise. Selon le dernier rapport statistique du ministère du Tourisme, le Québec recevait en 2016 autour de 1,2 million de millénariaux.

Toutes formules confondues, ces initiatives promettent une expérience à l’image des tendances actuelles : se rapprocher des locaux, créer un impact environnemental positif ou encore rencontrer d’autres voyageurs.

Et vous, organisez-vous des collectes de déchets dans votre région?

 

Source image à la une : Unsplash