Cuisines fantômes, restaurants et marques virtuels, de nouveaux concepts se sont développés de manière accélérée dans la foulée de la pandémie. Que ce soit pour lancer un nouveau produit ou offrir des services de livraison, ils apportent une solution aux problèmes de coûts et de pénurie de main-d’œuvre qui minent le secteur.
La fermeture des restaurants ou les limites qu’impose la COVID-19 en matière de service aux tables ont accentué les difficultés financières des restaurateurs. Au cours de la dernière année, plusieurs d’entre eux ont pris des décisions ardues et adapté leur modèle d’affaires pour essayer de garder la tête hors de l’eau. Les plats à emporter et la livraison enregistrent une popularité croissante alors que le concept des cuisines fantômes gagne du terrain.
Apparues depuis quelques années dans des villes comme Los Angeles, New York et San Francisco, les cuisines fantômes se répandent aux États-Unis, au Canada et même au Québec. Elles constituent un modèle d’entreprise alternatif rendu possible grâce à la notoriété des applications de commande en ligne. Elles sont utilisées pour exploiter un restaurant sans salle à manger. Le restaurateur loue un espace dans une cuisine existante et y produit son menu. Les clients peuvent commander leurs plats, soit sur le site Web de l’entreprise, soit par l’entremise d’applications mobiles ou d’applications de livraison tierces.
Plusieurs enseignes peuvent se regrouper et utiliser la même cuisine, un peu comme un espace de travail communautaire, mais pour les restaurants. Des entreprises comme Doordash, Kitchen United et Cloud Kitchens exploitent des lieux partagés pour de nombreux restaurants. Tout récemment, Ghost Kitchen Brands (GKB) a conclu un partenariat avec l’enseigne Walmart. Cette dernière aménagera une cuisine dans certains de ses magasins afin d’accueillir des marques partenaires de GKB, telles que Quiznos, The Cheesecake Factory Bakery, Beyond Meat ou Ben & Jerry’s pour n’en nommer que quelques-unes.
À Montréal, les quatre associés de la toute nouvelle entreprise Q-Zn ont transformé un grand espace en 16 cuisines commerciales qu’ils souhaitent louer à des restaurateurs. Ce concept « clé en main » offre une cuisine entièrement équipée, le service de plonge le soir, l’entreposage, la chambre froide, et la réception pour les livreurs d’Uber Eats, de Doordash ou de Skip the Dishes qui viennent chercher les commandes, etc.
D’autres regroupent leurs diverses activités dans un même lieu. C’est le cas d’Anthony Tzemopoulos, cofondateur de One Kitchen, qui a rassemblé dans une seule cuisine ses quatre restaurants existants et a créé quatre autres concepts de plats à livrer. Les commandes se prennent à partir de son site Web. En 2021, le restaurateur prévoit d’ouvrir sa cuisine à d’autres qui voudraient se joindre à lui.
Varier ses sources de revenus
Les cuisines fantômes aident aussi les propriétaires de restaurants « physiques » à diminuer leurs coûts d’exploitation en leur procurant des revenus de location. Martin Juneau, propriétaire du Pastaga, a dû fermer ses portes pour cause de pandémie. Il a sous-loué deux de ses locaux à deux autres chefs qui offrent des plats à emporter. Il a pu ainsi garder ses lieux ouverts et limiter les pertes. Le Chick-N-Waff, un nouveau concept qui tourne autour du poulet frit et des gaufres, n’a pas d’adresse physique. Il fonctionne à partir des cuisines du restaurant La Bêtise, à Verdun, quand l’établissement est fermé, du dimanche au mercredi. Cela permet aux deux propriétaires de partager les frais fixes.
Varier sa gamme de produits grâce au restaurant virtuel
Au lieu d’investir dans un nouvel établissement, certains restaurateurs élargissent leur offre et diversifient leur clientèle en proposant des produits inédits disponibles uniquement à la livraison ou à emporter. Ils ne louent pas d’espace de cuisine par l’intermédiaire d’un tiers. Ils utilisent les leurs pour préparer les plats qui seront offerts exclusivement en ligne. On parle alors de restaurants virtuels. C’est le cas du Kefi Taverna et du Yuno Sushi à Montréal, propriétés du chef Constant Mentzas du restaurant Ikanos, spécialisé dans les poissons et les fruits de mer. Ces deux restaurants virtuels présentent un menu complètement différent. Le premier propose des classiques revisités de la cuisine traditionnelle grecque et le second, comme son nom l’indique, vend des sushis.
Avantages pour les restaurateurs
La cuisine fantôme comporte de nombreux avantages pour les entreprises de restauration. Les propriétaires peuvent réduire considérablement leurs coûts d’exploitation en ayant moins d’employés et moins de pieds carrés. Elle offre également des perspectives aux nouveaux entrepreneurs puisque l’investissement initial pour exploiter ce type d’établissement est beaucoup plus bas que celui nécessaire à l’ouverture d’un restaurant complet.
Toutefois, construire et développer une marque uniquement en ligne, sans restaurant physique, exige un marketing numérique très efficace pour s’assurer une clientèle. C’est grâce à cette vitrine numérique que les acheteurs potentiels peuvent découvrir l’entreprise. De plus, si les médias sociaux étaient utiles avant, ils sont maintenant essentiels pour se faire connaître.
Un pas vers l’avenir
Les services de livraison de nourriture comme Uber Eats ou Skip The Dishes sont en pleine expansion au Canada. En 2019, les consommateurs ont dépensé 1,5 milliard de dollars dans ce secteur, selon une étude de l’Université Dalhousie à Halifax. Le marché mondial des applications de livraison devrait connaître une hausse annuelle de 28 % pour la période 2017-2023, d’après Allied Market Research. Les commandes à emporter ou à livrer sont là pour de bon et les cuisines fantômes profitent grandement de cette tendance. Et vous ? Saurez-vous en tirer profit ?
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