L’écoresponsabilité des musées : protéger le passé et le futur

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Julie Payeur Julie Payeur

Sensibilisation, diffusion et intégration de pratiques durables : le milieu muséal s’engage auprès des communautés et développe de nombreux projets écoresponsables.

Comme beaucoup d’autres secteurs d’activités, le milieu muséal prend conscience de sa responsabilité d’agir pour la protection de l’environnement et la lutte contre les changements climatiques. L’impact de ce secteur sur l’environnement est tributaire de l’empreinte carbone de la mobilité des clientèles et des expositions (qui viennent parfois de loin), ainsi que de la consommation énergétique des bâtiments et des déchets générés par les projets d’exposition éphémère. 

 

L’importance de l’implication des musées

Les musées ont la capacité de devenir des acteurs clés. D’après le Conseil international des musées (ICOM), ils « peuvent améliorer la prise en compte du développement durable et contribuer à l’éducation sur les questions des changements climatiques en travaillant avec les communautés et en leur donnant les moyens de provoquer des changements pour garantir une planète habitable, la justice sociale et des échanges économiques équitables à long terme ».  

En plus d’agir envers sa communauté, un musée peut effectuer de nombreuses actions durables au sein même de son organisation. Cet aspect s’avère d’autant plus important dans un contexte de sensibilisation du public. Le message diffusé sur les changements climatiques risque d’être beaucoup plus crédible si le musée montre l’exemple en adoptant lui-même des actions concrètes pour la protection de l’environnement.  

D’après Marie-Claude Mongeon, chargée de projet Planification stratégique et innovation au Musée d’art contemporain de Montréal et membre du comité consultatif Coalition of Museums for Climate Justice, il existe plusieurs bienfaits pour les musées à s’engager vers la voie de l’écoresponsabilité. Cela permet : 

  • d’être à l’écoute des visiteurs qui sont davantage sensibilisés à la cause ; 
  • d’améliorer l’engagement et la rétention du personnel ; 
  • d’offrir de nouvelles occasions créatives et artistiques ; 
  • de faire des économies en prônant la réutilisation du matériel ; 
  • de devenir une source d’informations de confiance pouvant amplifier les efforts collectifs en développement durable. 

 

Un pas « vert » l’écoresponsabilité

Voici quelques exemples de mobilisation du milieu muséal et de méthodes d’intégration de pratiques durables dans les organisations. 

 

Un conservateur pour les changements climatiques 

Depuis novembre 2021, le Musée royal de l’Ontario (ROM) compte dans son équipe un conservateur dédié exclusivement aux changements climatiques. C’est une première en Amérique du Nord. Via la programmation, l’éducation et les expositions, le Dr Soren Brothers travaille pour sensibiliser le public et motiver les actions sur l’urgence de la situation et la durabilité. Son rôle vise également à créer des partenariats à travers le monde pour étudier la gestion des changements climatiques à l’échelle locale et internationale. Par cette embauche, le ROM s’engage à diffuser ses connaissances et ses idées pour aider à montrer la voie vers un avenir durable. 

 

Offrir du soutien pour la formation 

Dans le cadre de leur collaboration « Roots and Branches », le Manchester Museum, le Museum Development North West et The Carbon Literacy Project ont créé une boîte à outils destinée au secteur muséal britannique pour les soutenir dans la lutte contre les changements climatiques.  

Grâce à Carbon Literacy for Museums, il devient possible de former les bénévoles, le personnel et les partenaires afin qu’ils agissent de manière éclairée face à l’urgence climatique. L’objectif est de rejoindre plus de 1500 personnes du milieu muséal au cours des deux prochaines années en accompagnant 300 institutions dans leur stratégie pour le climat. En plus de cet outil, le Manchester Museum offre un espace de coworking dédié à l’action environnementale. 

Plusieurs institutions muséales peuvent déjà témoigner de leur expérience (voir la vidéo). 

 

Le transport responsable : tout un art 

L’un des enjeux majeurs du virage écoresponsable des musées demeure l’empreinte carbone du transport, tant public que celui des expositions. Lors d’une séance de réflexion tenue en janvier dernier, les représentants des musées français ont estimé que l’une des solutions serait de renoncer aux projets « blockbuster ». Il faudrait alors miser sur un public de proximité, prolonger la durée des expositions et réduire la quantité d’œuvres ou en choisir qui proviennent davantage des collections du musée.  

C’est le choix qu’a fait le Palais des Beaux-Arts de Lille avec son exposition « Expérience Goya ». Dans le parcours d’éco-création, les responsables du projet ont décidé de privilégier la collection permanente et de restreindre le nombre de prêts venant de l’extérieur. L’objectif est de miser davantage sur la médiation et un discours scientifique fort que sur l’abondance des œuvres. 

 

Au Québec 

Plusieurs organisations proposent des ressources pour accompagner les musées dans leurs démarches durables telles que le Réseau des femmes en environnement ou la firme Écoscéno. La Société des musées du Québec offre également un guide sur l’écoresponsabilité. Il est possible d’y trouver des conseils pour la gestion des installations et des ressources humaines (efficacité énergétique, matières résiduelles, approvisionnement responsable, santé et sécurité, etc.), pour les expositions (conception, fabrication et chantier, démontage et deuxième vie) et pour les communications (internes, externes, design graphique et impressions). Il sera d’ailleurs intéressant de connaître les résultats qu’obtiendra la SMQ de son portrait des pratiques écoresponsables dans les institutions muséales de la province au cours de l’année 2022.   

 

Quels sont les gestes écoresponsables de votre musée ? 

 

Note: Cette analyse est la mise à jour de: Environnement et musée: protéger le passé et le futur  

 

Image à la une : Pexels