COVID-19 = crise de la main-d’œuvre féminine ?

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Julie Payeur Julie Payeur

Pertes d’emplois, remise en question du choix de carrière, précarité financière et augmentation des obligations familiales ; les répercussions de la COVID-19 sur la main-d’œuvre touchent particulièrement les femmes.

Certains gains pour l’égalité des sexes en milieu de travail obtenus au cours des dernières décennies pourraient disparaître. La pandémie cause bien des soucis aux travailleurs et travailleuses du monde entier. Mais saviez-vous qu’elle frappe principalement les femmes ? Plusieurs spécialistes osent même parler d’une « shecession » (récession au féminin) pour décrire l’impact disproportionné de l’actuelle récession sur le personnel féminin par rapport aux autres crises qui atteignaient surtout les hommes.  

 Le Forum Économique Mondial estime qu’environ 28 millions de femmes âgées de 25 ans et plus ont quitté le marché du travail dans 55 pays à revenu intermédiaire et élevé au cours de la dernière année comparativement à 24 millions d’hommes. L’organisme ajoute que cela représente une grave menace pour la situation économique d’un grand nombre de femmes étant donné qu’elles étaient déjà moins susceptibles de faire partie de la population active.  

Au Canada et aux États-Unis, près du quart des femmes prévoiende délaisser leur emploi, de réduire leurs heures de travail ou de diminuer d’une autre manière leur charge de travail en raison de la pandémie et de ses retombées. Voilà quelques faits saillants du rapport de McKinsey&Company qui a interrogé plus de 40 000 employées en Amérique du Nord.  

Mais pourquoi ?

Les experts s’accordent pour dire qu’il existe deux causes principales à cette situation. La première : les femmes touchées occupent des postes grandement affectés par la fermeture et les mesures sanitaires dans des secteurs ayant une forte propension aux interactions sociales tels que le service à la clientèle, la vente, la restauration, etc. La deuxième : les charges familiales ont considérablement augmenté avec la fermeture des écoles et des garderies laissant ainsi plusieurs femmes dans l’impossibilité de travailler puisqu’elles doivent pallier ce manque de service. Bien que le télétravail ait offert une certaine flexibilité, il apporte son lot de défis et n’est pas nécessairement propice à tous les milieux de vie.   

 

Les postes de directions 

La crise a également une incidence sur le parcours professionnel des dirigeantes. Aux États-Unis, une femme sur quatre envisage de rétrograder sa carrière ou de quitter le marché du travail en raison des défis engendrés par la COVID-19, d’après l’étude Women in the Workplace 2020 de McKinsey & Company et LeanIn.Org. Les principaux facteurs seraient le manque de flexibilité du travail et la pression d’être aussi active et performante que leurs homologues masculins, malgré l’ajout de charges familiales.  

 

Les répercussions de cette crise

Avec l’augmentation de la précarité financière chez les femmes et l’alourdissement des charges familiales, plusieurs pourraient choisir de quitter une entreprise en faveur d’industries à moindre risque ou tout simplement de ne pas revenir sur le marché du travail. Il y aurait donc une perte d’expertise et de la diversité organisationnelle. Globalement, les progrès vers l’égalité des sexes observés au cours des dernières décennies pourraient non seulement s’arrêter, mais s’inverser.  

Il y aurait donc une perte d’expertise et de la diversité organisationnelle.

 

Au Québec  

Selon le ministère du Travail, les femmes occupaient 68 % des emplois perdus au Québec d’octobre 2019 à octobre 2020, soit le double des pertes observées chez les hommes. La plupart des licenciements ont eu lieu dans les secteurs de la restauration, du tourisme et de la culture.  

 

En tourisme

En 2019, les femmes occupaient 51 % des postes dans l’industrie touristique québécoise. Dans certains secteurs d’activité, comme l’hébergement et la restauration, elles y étaient également plus présentes (voir l’infographie suivante).  

En 2019, certains métiers en tourisme étaient occupés en grande partie par des femmes. Par exemple :  

 

Restauration  

  • Maîtres d’hôtel et hôtes/hôtesses (82 %)  
  • Serveurs d’aliments et de boissons (71 %)  

Hébergement  

  • Préposés à l’entretien ménager (75 %)  
  • Serveurs d’aliments et de boissons (75 %)  

 Services de voyages  

  • Directeurs — commerce de détail (89 %)  
  • Conseillers en voyages (80 %)  

Transport de personnes  

  • Commissaire et agents de bord (86 %)  
  • Agents à la billetterie et aux services aériens (67 %)  

 

D’après l’enquête auprès des travailleurs. euses en marge de la COVID-19 du Conseil québécois des ressources humaines en tourisme (2020), les mesures sanitaires ont particulièrement pénalisé les secteurs des services de voyages, de l’hôtellerie et de la restauration Sans conclure que les femmes ont été plus ou moins touchées que les hommes ayant la même profession, les postes les plus affectés par les mises à pied durant la pandémie sont occupés majoritairement par une main-d’œuvre féminine.  

Comment diminuer les impacts ?

À la lumière des chiffres et des récentes études, l’avenir de la main-d’œuvre féminine demeure fragile. Que ce soit à petite ou à grande échelles, de nombreuses actions peuvent être appliquées pour remédier à la situation (voir infographie suivante). 

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À l’international, l’initiative Women in Travel Thrine a été créée par des femmes de l’industrie du voyage pour réduire l’impact de la COVID-19 sur la progression de carrière de la main-d’œuvre féminine. L’objectif est de bâtir des liens et d’ouvrir des portes en misant sur le partage d’expériences et le mentorat. Parmi les fondatrices figurent Dorothy Dowling, directrice du marketing et vice-présidente principale de Best Western Hotels & Resorts, et Melissa Maher, vice-présidente principale du marketing et de l’engagement de l’industrie chez Expedia Group.  

 

Peu importe la raison, l’ouverture à la diversité et l’inclusion dans les valeurs d’une organisation permettront à celle-ci de tirer son épingle du jeu dans les années à venir. Elle aura saisi l’évolution des besoins et des comportements des consommateurs afin de refléter la pluralité des pensées d’une société en mouvance. 

 

 Source de l’image à la une : PEXELS