La quête du bonheur inspire à voyager

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Amélie Racine Amélie Racine

Une motivation extraordinaire habite les personnes qui envisagent un séjour touristique : voyager les rend heureux.

Quand le voyage fait du bien

Plusieurs liens entre le bonheur et le voyage sont documentés dans la littérature scientifique. Les bienfaits s’expriment en amont durant la période d’anticipation, sur place pendant le séjour ainsi qu’au retour en se remémorant ou en partageant des souvenirs. Selon différentes études, les dépenses associées à des expériences rendent également plus heureux que celles attribuées à des biens matériels. Ces constats affectent favorablement la demande pour les voyages et expliquent en partie l’intérêt soutenu des consommateurs pour le secteur du tourisme, même en période incertaine.

 D’après l’enquête menée par la Chaire de tourisme Transat en novembre 2023, une majorité des voyageurs québécois pour qui le voyage joue un rôle important pour leur santé mentale affirment avoir envie de voyager malgré le contexte actuel (73 % d’entre eux, contre 38 % du reste des voyageurs sondés). La moitié déclare que le voyage demeure une dépense prioritaire dans leur budget, contre seulement 7 % de ceux qui n’associent pas le voyage à leur santé mentale. Une proportion similaire exprime son besoin de partir en réalisant plus d’un voyage par année (46 % contre 21 %).   

Parmi ces personnes, on retrouve un peu plus de femmes (58 % contre 47 % du reste de l’échantillon), de personnes âgées de 35 à 44 ans (20 % contre 14 %), ayant un diplôme universitaire (48 % contre 38 %), ou un revenu de ménage de 100 000 $ et plus (48 % contre 40 %).   

Le bien-être, un ingrédient qui contribue au bonheur

La quête du bien-être représente une tendance qui était déjà observée avant la pandémie. Or, force est de constater que, depuis cette période, de nouveaux comportements s’ancrent chez les consommateurs. De plus en plus préoccupés par leur santé et leur bien-être holistique (physique, mental, spirituel, émotionnel, social et environnemental), ils sont nombreux à adopter des modes de vie plus préventifs que réactifs.  

En voyage, cela se traduit par une volonté de maintenir ses bonnes habitudes, voire d’améliorer son état personnel. Selon la Global Wellness Institute (GWI), une organisation à but non lucratif reconnue mondialement pour ses recherches sur le sujet, le secteur comprend deux types de voyageurs : pour une majorité (88 %), les expériences de bien-être constituent une des composantes de leur voyage d’agrément, alors que pour 12 %, il s’agit de la principale motivation à partir et cela oriente tous les autres choix (destination, activités, etc.). Ce dernier segment aime notamment effectuer des retraites ou des séjours dans des établissements de spas.  

D’après le chercheur Edward F. Diener, sommité mondiale pour ses travaux portant sur le bien-être subjectif*, les activités qui sont intéressantes, engageantes et significatives contribuent à un sentiment accru de bonheur et de satisfaction dans la vie. Le voyage offre un contexte idéal à la réalisation de tout cela. 

Les actes de bonté qui propulsent le bonheur

Plusieurs grands constats sur le bonheur ressortent de différentes éditions du World Happiness Report**. Parmi eux se trouve la progression remarquable (hausse de plus de 25 % depuis 2019) de trois actes de bonté, soit : l’aide apportée à un inconnu, le bénévolat et les dons. Les auteurs observent que venir en aide apporte du bonheur tant à celui qui en bénéficie qu’à celui qui la procure.  

Dans un contexte touristique, il n’y a pas que les voyages à caractère humanitaire qui portent sur l’entraide. Par exemple, une tendance qui progresse dans le secteur des événements, réunions et congrès consiste à susciter un impact positif sur la destination et la communauté hôte. On retrouve ainsi des projets sociaux ou environnementaux dans la programmation ou en marge de l’événement qui contribuent favorablement au bien-être de la destination, voire aident à résoudre certains enjeux locaux. Il est aussi de plus en plus courant que des activités de team building prennent la forme d’actions bénévoles où tous les membres d’une équipe offrent du renfort en réalisant un projet commun. Dans ces deux cas, l’aide apportée est salutaire à celui qui la reçoit et aussi à ceux qui s’investissent dans l’activité, car faire du bien procure du bonheur collectivement et personnellement.  

Ce type de spirale vertueuse contribue à un tourisme plus régénératif. En intégrant des activités à impacts positifs à leur séjour, non seulement les voyageurs s’investissent dans leur propre bonheur, mais ils laissent aussi, dans une certaine mesure, la destination et sa communauté dans un meilleur état qu’ils les ont trouvées. 

Dans une optique d’intégrer une approche plus régénérative du tourisme, une main doit être tendue à cette niche de voyageurs qui souhaitent intégrer graduellement des activités vertueuses à leur déplacement, notamment par la forme d’implication bénévole ou de participation payante à des projets communautaires environnementaux ou sociaux. En plus d’avoir le sentiment de faire du bien, cela leur permet aussi de ressentir une connexion avec les résidants ou le territoire visité, de vivre une expérience significative et de laisser une trace positive de leur passage.   

Or, il convient d’accompagner les voyageurs afin qu’ils puissent accéder à des offres qui leur permettront de réellement vivre ce type d’expériences. Comment répondre aux divers besoins d’une communauté si ceux-ci ne sont pas communiqués ? La création de nouvelles propositions qui intègrent une vision régénératrice et l’adaptation de l’offre déjà existante deviennent synonymes de prospérité pour la destination. Cette approche du tourisme répond ainsi non seulement aux besoins de vitalité de la biodiversité, des communautés et des entreprises, mais également aux aspirations de bonheur de ses visiteurs.  

 

*Pour Ed Diener, le concept de bien-être subjectif consiste à ressentir un niveau élevé d’émotions agréables (joie, plaisir, gratitude, etc.) et un niveau faible d’affects désagréables (anxiété, colère, peur, etc.) ainsi qu’un sentiment élevé de satisfaction par rapport à sa propre vie.   

**Le World Happiness Report est produit à partir d’enquêtes effectuées dans plus de 150 pays sur la perception que les répondants ont de leur vie.  

Image à la une : Pexels

Cet article se retrouve dans le Cahier Tendances 2024 réalisé par l’équipe de la Chaire de tourisme Transat.