Le développement de l’économie nocturne permet à plusieurs destinations de reconquérir le cœur des voyageurs et de créer des milieux inclusifs, sécuritaires et accessibles.
Depuis la pandémie, la ville est un espace complexe et fragilisé qui cherche à retrouver son équilibre en testant de nouvelles propositions qui s’arriment aux besoins de ses usagers et à sa vocation de lieu social et de rencontres.
Comme l’explique l’équipe de la Chaire de tourisme dans son Cahier Tendances 2023, les villes sont vouées à un avenir prometteur. D’après le dernier rapport du World Travel & Tourism Council, le tourisme urbain devrait croître plus rapidement que tous les autres secteurs, le faisant ainsi devenir la locomotive de la reprise des voyages pour la prochaine décennie. Les acteurs des centres urbains devront se concerter et miser ensemble sur leurs atouts afin de tirer leur épingle du jeu en proposant des expériences et célébrations inoubliables. En ce sens, plusieurs destinations misent sur le développement de leur économie nocturne pour dynamiser leurs communautés et attirer davantage de touristes.
L’économie nocturne = le nightlife ?
N’en déplaise aux amateurs de rythmes musicaux endiablés, le nightlife n’est qu’un des aspects de cette économie, bien qu’il en constitue une part importante. Il n’existe pas de définition officielle, mais il est possible de la résumer comme étant l’ensemble des activités, entreprises et travailleurs opérant entre 18 h et 6 h du matin : les transports, l’hôtellerie, la sécurité, le divertissement, le commerce de détail, etc.
Selon la Night Time Industries Association (NTIA), il devient important, plus que jamais, pour les villes de planifier la nuit comme le jour dans un contexte où leurs lieux de vie nocturne ont été parmi les premiers à fermer et les derniers à ouvrir lors des différentes vagues de la pandémie. D’autant plus que les secteurs urbains profitent de circonstances favorables intéressantes pour reconquérir le cœur des travailleurs et des voyageurs. Il y a un momentum à saisir !
Voici deux destinations qui déploient des efforts inspirants pour stimuler leur économie nocturne.
Londres : les artères principales au cœur de la nuit
Dans sa stratégie de créer une ville dynamique 24 h sur 24, la Mairie de la capitale britannique a décidé de mettre de l’avant ses rues commerciales grâce au programme Night Time Enterprise Zone. Dans le cadre de ce dernier, l’administration de l’arrondissement et les entreprises coopèrent pour expérimenter de nouvelles façons de diversifier leur offre nocturne. Il peut s’agir d’augmenter les heures d’ouverture ou encore la participation et l’animation dans un espace délimité d’une artère commerciale. L’objectif est de rendre les rues plus accessibles, inclusives et accueillantes après 18 heures.
À la suite du succès du projet pilote sur la Walthamstow High Street en 2019, qui a permis l’augmentation de la fréquentation de 22 %, le programme s’étend désormais à trois nouvelles rues commerçantes de Londres. Aux yeux de la Mairie, ce programme démontre encore plus son importance depuis la pandémie, puisque les artères sont la pierre angulaire des diverses communautés de la ville, et que leur rôle la nuit sera crucial pour la reprise économique et sociale de Londres.
Répondre aux enjeux de sécurité
L’économie nocturne joue un rôle crucial dans la vie culturelle et sociale des communautés britanniques. Il s’avère important de veiller à ce que les groupes marginalisés et vulnérables soient entendus et protégés. La NTIA et la Safeguarding Nightlife ont donc uni leur force pour offrir aux travailleurs et intervenants le programme Night Safe Champion.
Il s’agit d’une accréditation qui s’obtient à la suite d’une formation de neuf modules touchant divers sujets tels que la sensibilisation à la vulnérabilité, le harcèlement sexuel, les drogues, la gestion des conflits, etc. L’objectif n’est pas seulement de conscientiser, mais de restaurer la confiance des communautés par la collaboration et l’action.
Source : Night Safe Champion
Sydney : la force de la concertation
Le partenariat entre les acteurs de différents secteurs constitue un élément clé pour la réussite de l’économie nocturne. La ville de Sydney l’a bien compris.
En septembre 2020, le gouvernement de la Nouvelle-Galles-du-Sud (NSW), en Australie, lance sa vision à long terme pour Sydney via sa stratégie économique 24 heures sur 24. L’objectif est de soutenir la création d’emplois, favoriser les arts et la culture et renforcer le statut de destination internationale nocturne de Sydney.
Pour faire écho à la nouvelle stratégie, l’organisme VibeLab a tenu l’édition 2021 du forum Global Cities After Dark à Sydney. Cet événement rassemble toutes les parties prenantes de l’économie nocturne locale afin d’exploiter les connaissances collectives pour créer des villes dynamiques et sécuritaires après la tombée de la nuit, tant pour les travailleurs et les citoyens que les visiteurs. Plus de 150 personnes provenant des secteurs de l’hôtellerie australienne et internationale, de la musique, du divertissement, des événements majeurs, du tourisme culturel, des transports et de la sécurité civile se sont réunies. Cette consultation a permis un partage et des discussions sur les réalités vécues dans chaque secteur. Elle a aussi donné lieu à la formulation de 14 recommandations visant à maximiser le potentiel nocturne de la métropole australienne. Bien qu’elles soient formulées par secteur d’activités, l’ensemble des participants y ont réfléchi. Les discussions ont révélé des thématiques d’actualité sur lesquelles il est important de se pencher collectivement telles que la diversité et l’équité, ainsi que l’utilisation des données. Le nombre d’acteurs impliqués par action montre bien la nécessité de la synergie pour porter des actions structurantes.
Le saviez-vous ?
Le rôle de « night mayor » est mis en place dans de nombreuses villes dans le monde entier pour aider à développer des politiques, faciliter une vie nocturne florissante et faire des villes un espace clé de coexistence et de socialisation.
Un nouveau jour pour la nuit ?
Les démarches qui incluent l’ensemble des parties prenantes nocturnes permettent l’équilibre d’un écosystème urbain, où plusieurs types d’activités se côtoient. La globalité des groupes doit être considérée, pour le plus grand bénéfice de tous.
Dans la métropole québécoise, l’organisme MTL 24/24 anime, analyse et structure la vie nocturne à Montréal. Les partenariats et les échanges de connaissances entre les différents secteurs d’activités sont plus que jamais nécessaires à l’heure de la résilience et de la revitalisation des milieux urbains post-pandémie.
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Image dans le texte : Pexels
Cet article est la version longue de celui paru dans le Cahier Tendances 2023 réalisé par l’équipe de la Chaire de tourisme Transat.