Le métavers aurait le potentiel de pénétrer l’écosystème du tourisme et de faire évoluer l’expérience des voyageurs avant, pendant et après leur séjour.
Le métavers est né de la fusion entre le mot « meta » et « univers ». Beaucoup le définissent comme étant l’internet de l’avenir qui permet de créer des mondes virtuels immersifs, interactifs, transactionnels et ludiques dans lesquels les individus peuvent vivre des réalités virtuelles grâce à des avatars de la même manière qu’ils expérimentent leur vie réelle.
Il existe un certain nombre de plateformes et de dispositifs permettant aux utilisateurs d’accéder au métavers, sur ordinateur à l’aide d’un navigateur internet, avec un casque de réalité virtuelle ou avec des lunettes de réalité augmentée.
Les premiers pas du métavers
Dans le métavers, le monde virtuel est envisagé comme une extension du monde réel.
Bien que son appellation soit récente, le concept de métavers n’est pas nouveau. Le premier exemple qui s’en rapproche le plus est le « jeu » ou « l’univers » Second Life qui date de 2003. Ce monde virtuel en 3D que plusieurs vouaient à l’échec à son lancement continue pourtant d’exister ; ses revenus en 2021 sont estimés à environ $ 650M USD et le nombre de ses utilisateurs actifs gravite autour de 900 000.
Mais que font ces adeptes sur Second Life ? Ils se rencontrent grâce à des avatars et développent des communautés (réseautage social), créent leur propre espace virtuel (contenu généré par les utilisateurs), jouent à des jeux, explorent de nouveaux territoires, assistent à des concerts, achètent et vendent des articles virtuels et peuvent même créer leur entreprise, devenir architecte, organisateur d’événements ou guide touristique.
Dans le métavers, le monde virtuel est envisagé comme une extension du monde réel et non une alternative, comme le propose Second Life. Voici quelques éléments qui contribuent à l’intérêt actuel envers le métavers :
-La familiarisation des individus avec le monde virtuel, notamment à travers les jeux vidéo qui connaissent une grande popularité ;
-La constante amélioration des équipements et des technologies sur lesquelles se base le métavers (Blockchain et cryptomonnaie, réalité virtuelle, réalité augmentée, réalité mixte, immersion 3D, 5G, etc.) ;
-La multiplication et l’engouement envers les expériences immersives ;
-Les avancées de l’intelligence artificielle ;
-La démocratisation des relations humaines virtuelles depuis le début de la pandémie.
Il existe quelques plateformes proposant des métavers, tels que The Sandbox, Decentraland, Roblox, Sensorium ou Meta Horizon Worlds (de Facebook). Chacune d’elles constitue un univers en soi et a sa propre communauté d’utilisateurs.
Dans l’absolu, il existe deux façons potentielles de s’impliquer dans le métavers :
Collaborer avec les plateformes métavers actuelles : les entreprises peuvent y établir leur présence commerciale en achetant une parcelle (terrain numérique) et en y construisant une structure personnalisée (par exemple, un magasin où les utilisateurs peuvent voir des articles numériques et habiller leur avatar). Elles peuvent également y organiser des événements thématiques et maintenir une communauté autour de la marque dans cet espace virtuel.
Créer une solution de métavers personnalisée : les entreprises peuvent créer des solutions métavers personnalisées avec des fonctionnalités d’applications qui répondent à leurs propres besoins commerciaux. Par ailleurs, des marques pourraient transformer leur propre métavers en un écosystème de leur créneau particulier.
De nombreuses opportunités existent, mais les coûts de développement sont encore élevés et ce sont principalement les grandes marques qui peuvent pour le moment accéder à cette nouvelle technologie.
Par ailleurs, selon Gartner, une firme de recherche spécialisée dans le domaine des technologies avancées, des entreprises créeront des métavers de leurs organisations pour offrir à leurs employés un meilleur engagement, une meilleure collaboration et une meilleure connexion grâce à des espaces de travail immersifs dans des bureaux virtuels.
Un horizon de dix ans pour un développement plus abouti
Le métavers est sans aucun doute en émergence. Gartner le situe même dans un horizon de dix ans et plus et le considère parmi les technologies potentiellement perturbatrices à un stade précoce de développement. Au Québec, un sondage en ligne mené auprès de 1 007 voyageurs québécois issus d’un panel privé révèle que 51% des répondants en ont déjà entendu parler, toutefois 27% ne voient pas bien de quoi il s’agit.
Bien que le métavers en soit à ses balbutiements, plusieurs industries comme celle du luxe, du jeu vidéo, de la mode, des arts et du divertissement ont déjà acheté des biens ou mené des activités sur le métavers pour mieux comprendre ce nouvel univers.
Et le tourisme ?
Plusieurs cas d’usages du métavers ont le potentiel d’être appliqués au tourisme : faire la promotion de sa marque, de son établissement ou de sa destination, présenter de l’information essentielle sur son offre de manière immersive, créer des expériences de réservation fluide et réaliste, organiser des événements et des spectacles ou tenir une boutique virtuelle.
Le fait d’essayer avant d’acheter, même de façon virtuelle, peut augmenter le taux de réservation et de conversion. En hébergement par exemple, le métavers peut permettre aux voyageurs de prendre des décisions d’achat éclairées en vivant une expérience immersive réaliste de leur future chambre d’hôtel et de ses fonctionnalités. Le même bénéfice s’applique au secteur des événements et des banquets, où les caractéristiques des salles sont primordiales et peuvent être mieux perçues et appréciées dans un environnement 3D.
Des opérateurs touristiques font déjà le pas
En Espagne la station balnéaire Benidorm a annoncé Benidorm Land, un projet pilote qui présente une version virtuelle de la destination aux 140 millions d’utilisateurs de la plateforme de jeux vidéo Steam. Il s’agit d’une preuve de concept pour une future application visant à promouvoir la destination auprès d’un public numérique et à s’ouvrir à un nouveau mode de communication.
Ibis Styles, la marque hôtelière qualifiée de plus créative du groupe Accor, a débuté dans le métavers en lançant la galerie d’art virtuelle « Open to Creators », en partenariat avec un artiste numérique connu mondialement et dont les œuvres numériques seront accessibles via la plateforme spatial.io. La galerie virtuelle suit les derniers événements physiques des nouveaux hôtels ibis Bangkok Silom et ibis Styles Sevilla, où des œuvres originales ont été créées à l’occasion de leur ouverture. La galerie se veut modulable et évolutive afin de mettre en avant les prochaines ouvertures d’hôtel ainsi que les nouveaux artistes du programme Open to Creators.
Dans le domaine aérien, Qatar Airways a lancé QVerse, une expérience de réalité virtuelle qui permet aux utilisateurs de visiter la zone d’enregistrement Premium de l’aéroport international Hamad ainsi que d’explorer virtuellement l’intérieur de la cabine. Il s’agit de la première compagnie aérienne mondiale à introduire un équipage de cabine MetaHuman (Sama) qui offre une expérience client interactive.
Vueling, une compagnie low cost espagnole prévoit d’offrir à ses clients la possibilité de visualiser et de réserver leurs voyages avec le transporteur via un canal de distribution dans le métavers.
British Airways a introduit la réalité virtuelle dans le cadre de son divertissement en vol en première classe.
À son tour, Emirates a révélé son intention d’investir 10 millions de dollars dans la création « d’expériences de marque » de signature dans le métavers.
Pour créer une expérience de magasinage immersif, l’aéroport Heathrow à Londres s’est, quant à lui, associé à des marques de luxe telles que Chanel et leur « vaisseau spatial de beauté », pour permettre aux passagers d’essayer virtuellement des produits.
Bien qu’encore à ses débuts, le métavers a le potentiel d’enrichir et de faciliter les expériences de voyage avant, pendant et après le séjour et de créer un sentiment d’engagement avec les marques. Face à cette innovation émergente, il s’agit de rester à l’affût des différentes initiatives, d’apprendre, d’explorer et de se préparer.
Image à la une : Pexels
Cet article se retrouve dans le Cahier Tendances 2023 réalisé par l’équipe de la Chaire de tourisme Transat.