Devant les défis d’enneigement de certaines régions, des gestionnaires touristiques se tournent vers de jeunes pousses et de nouvelles approches afin de sauver les sports hivernaux.
Les activités en montagne sont de plus en plus chamboulées par l’imprévisibilité des conditions météo. Depuis déjà quelques décennies, l’industrie du ski doit s’adapter à des conditions météorologiques incertaines. Le recours à la fabrication de neige en est un bon exemple. Toutefois, devant les impacts environnementaux associés à certaines pratiques d’enneigement, l’acceptabilité sociale n’est pas toujours au rendez-vous.
Pour contrer les pertes économiques importantes pouvant découler du manque d’enneigement, plusieurs stations de montagne produisent des plans de développement adaptés à la réalité climatique. Au-delà de la diversification de l’offre d’activités, de nouvelles méthodes à faible empreinte sont testées et adoptées pour préserver le couvert neigeux sur les pistes.
L’économie circulaire pour produire des flocons
Aux États-Unis, la station de ski Yellowstone Club utilise les eaux usées du village de Big Ski, situé à proximité, pour fabriquer l’or blanc nécessaire au bon déroulement de ses activités. Les eaux usées sont traitées une première fois avant d’être transformée en neige. Elles sont filtrées à nouveau par le sol lors de la fonte printanière. La stratégie de réutilisation des eaux usées a été analysée pendant près de 20 ans, sous la forme de projets pilotes et de recherches, avant de devenir le programme lancé à l’hiver 2024. Le procédé sert aussi à arroser les terrains de golf adjacents à la montagne durant la saison estivale. Le permis octroyé nécessite une surveillance continue de l’impact du projet sur la qualité de l’environnement.
Réutiliser et conserver la neige
Le snowfarming est une méthode visant à optimiser les accumulations de neige. Cette approche permet de garder la couverture neigeuse durant l’été et de la réutiliser pour la saison hivernale subséquente. La neige est conservée à partir d’une récolte en bordure des pistes au printemps. La matière recueillie est ensuite préservée sous la forme de monticule couvert d’une couche isolante qui le protège de la fonte. Cette neige sert éventuellement de base pour préparer les pistes de ski de fond, de ski alpin ou est utilisée pour la tenue d’événements sportifs. Depuis 2008, l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches de Suisse (SLF) s’intéresse au snowfarming comme mesure pour contrer les hausses de mercure néfastes aux activités des stations. Selon un rapport publié en 2019, les procédés de protection de la vieille neige limitent de 10 à 25 % la fonte pendant la belle saison.
Au Canada, la station Sunshine Village Resort de Banff pratique une autre forme de snowfarming. Elle retient la neige poussée par le vent à l’aide de clôtures le long de la piste, cette neige est ensuite dispersée sur les pentes à l’aide de machinerie.
Les jeunes pousses à la rescousse de l’or blanc
En Autriche, la startup BergWind propose de transformer les remontées mécaniques en une série d’éoliennes afin de produire l’électricité nécessaire aux activités des stations. Le système de mini-éoliennes se fixe aux ancrages normalement utilisés pour les télésièges ou télécabines. Une idée audacieuse permettant de réduire les impacts environnementaux de la production de neige, tout en utilisant les infrastructures déjà en place. La méthode est en phase de financement.
Recours à la science : des approches réfléchies
Pour les gestionnaires de station en montagne, connaître la profondeur des couvertures de neige des pistes sur l’ensemble d’un territoire et repérer les correctifs à apporter pour offrir une expérience de glisse idéale peut s’avérer complexe. Au cours des dernières années, de nouveaux outils et logiciels ont vu le jour afin de faciliter la planification grâce à des données pointues.
En Californie, Mammoth Mountain utilise un satellite, SNOWsat, qui détecte les endroits les plus enneigés. L’épaisseur de la couverture neigeuse du domaine skiable est analysée et offre un portrait de la qualité des pistes et des actions à poser pour les améliorer.
L’outil ClimSnow évalue l’état futur des couvertures de neige en se basant sur les projections climatiques et en prenant en compte les spécificités du terrain analysé. Les données recueillies transmettent une modélisation et des graphiques de progression permettant de mettre en place des plans adaptés.
Créé en banlieue de Grenoble, DIA4S travaille à valoriser les aménagements et les compétences du personnel des stations de ski. L’entreprise offre une aide à la décision du personnel technique grâce aux applications Prosnow et TipSnow. Les technologies permettent de recueillir des données et des variables d’intérêt (épaisseur de neige, températures, vent et précipitations). Ces informations sont d’une grande utilité afin d’assurer les meilleures conditions de ski possibles, particulièrement pour les périodes touristiques clés.
Diversifier et réduire les vulnérabilités
Les régions qui développent une offre de tourisme hivernal doivent composer avec plusieurs impondérables résultants des changements climatiques. Que ce soit au Canada ou ailleurs dans le monde, plusieurs stations en montagne souhaitent diminuer leur dépendance au ski, en raison des prévisions d’enneigement pour les prochaines années. Les défis de ces entreprises s’accentuent et travailler à réduire les vulnérabilités qui rendent la pratique d’activités hivernales complexes devient un incontournable.
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