Les voyages au service des cerveaux

6 minutes de lecture

Claudine Barry Claudine Barry

«Rien ne développe lintelligence comme les voyages», disait Émile Zola. Et si cet enthousiasme du célèbre auteur traduisait une part de vérité?  

La littérature scientifique abonde en matière de bienfaits des voyages sur le cerveau humain. Découvrir des endroits pour la première fois, apprendre d’autres cultures, essayer de nouvelles activités, entrer en contact avec des étrangers, se repérer dans des lieux qui nous sont inconnus, tous ces aspects du voyage sont extrêmement bénéfiques pour l’esprit, tant sur le plan de la santé physique du cerveau que celui de la santé mentale. 

Créer de nouvelles connexions

Des découvertes en neurosciences permettent de comprendre que la performance cognitive peut être améliorée par des stimulations extérieures. Le terme scientifique de cette faculté du cerveau à changer est la neuroplasticité. Pour y parvenir, l’humain doit délaisser ses habitudes, sa routine pour favoriser la création de nouvelles dendrites, soit les connexions entre les neurones. Celles-ci facilitent la transmission de l’information à travers les différentes zones du cerveau.  

Le Dr Paul Nussbaum, neuropsychologue clinique à l’Université de Pittsburgh, soutient que lorsqu’un cerveau est exposé à un environnement nouveau et complexe, il réagit directement. Dès qu’un individu pose le pied dans un endroit qui lui est inconnu, il est submergé de nouvelles expériences. Pour traiter tous ces stimuli, le cerveau réagit comme s’il s’agissait d’un muscle et se renforce en créant des connexions, des dendrites. Plus une personne détient de dendrites fonctionnelles, meilleure est la performance cognitive de son cerveau. Cela signifie une meilleure capacité d’attention, une plus grande facilité à résoudre des problèmes complexes, une meilleure mémoire et un esprit plus vif.  

Un gym pour le cerveau

Apprendre quelques mots dans une nouvelle langue, décoder des noms de rue, chercher son chemin, goûter à de nouvelles saveurs, discuter avec des inconnus, interpréter de nouveaux codes culturels : en voyage à l’étranger, le pilote automatique est désactivé et de nombreuses parties du cerveau sont sollicitées. Le voyage est un véritable centre sportif pour la matière grise !  

Stimule la créativité

La flexibilité cognitive est indispensable à la créativité. D’ailleurs, plusieurs études démontrent le lien entre le fait de voyager et la créativité. Des chercheurs de la Kellogg School of Management de l’Illinois ont observé que les étudiants avec de l’expérience de voyage à l’étranger ont résolu de façon plus créative des problèmes compliqués comparativement à ceux n’ayant pas voyagé. L’ouverture à d’autres cultures et d’autres points de vue pourrait contribuer à aborder les problèmes et leurs solutions différemment. 

Prévient le vieillissement

Afin de bénéficier de cette plasticité du cerveau pour le mieux, le Dr Michael Merzenich, pionnier dans les recherches sur le sujet, souligne l’importance de sortir de sa zone de confort et d’embrasser la nouveauté tout au long de la vie, peu importe l’âge. Selon la Global Coalition on Aging, des recherches suggèrent que la participation régulière à des activités sociales ou de loisirs, y compris les voyages, a le potentiel de réduire le risque de démence et de développer la maladie d’Alzheimer. 

Réduit le stress, accroît la productivité  

Plusieurs études exposent les effets des voyages sur la santé mentale. Globalement, on peut y lire que les vacances dans de nouveaux endroits réduisent la tension et le stress liés au travail. Ces temps d’arrêt permettraient aussi au voyageur de se sentir plus attentif et productif à son retour. Selon une étude de la Surrey University, au Royaume-Uni, la seule planification d’un voyage générerait des émotions de bonheur et réduirait la tension et le stress. Des chercheurs de la Corée du Sud ont même observé que l’organisation du séjour rend heureux, et que les bénéfices émotifs persistent jusqu’à un mois après le voyage.

Voyage d’agrément : Sortir de la zone de confort

Dans un contexte de vacances, pour favoriser la stimulation du cerveau et, du même coup, la santé cognitive de nos visiteurs, il faut ainsi penser à leur faire vivre des expériences nouvelles, tenter de provoquer les rencontres, intégrer des découvertes culinaires, culturelles, linguistiques, développer des visites ludiques qui poussent à la créativité, etc. Il s’agit d’un pari plutôt facile, même amusant. Voici, en rafale, quelques idées ; 

  • Réunir, au restaurant, des clients qui ne se connaissent pas autour de longues tables pour favoriser les échanges entre eux ; 
  • Surprendre les visiteurs avec des expériences insolites attractives ; 
  • Promouvoir des expressions langagières typiques à travers les outils de communication ; 
  • Inciter des néophytes à essayer une nouvelle activité en créant un environnement sûr et agréable ; 
  • Créer des expériences interactives ; 
  • Favoriser l’immersion culturelle (ex. dans une communauté autochtone, dans un milieu artistique) ; 
  • Proposer des découvertes gourmandes étonnantes. 

Faites preuve de créativité ! Si votre cerveau est bien entraîné, les options viendront d’ellesmêmes !

Pour les jeunes et moins jeunes

Les voyages forment la jeunesse ! Une étude de McKinsey dévoile qu’en voyage, les membres de la génération Z cherchent à expérimenter la nouveauté et à entrer en relation avec d’autres. Voilà deux façons efficaces d’entraîner le cerveau qui viennent plutôt naturellement chez les jeunes. Selon les recherches de la Dre Marian Diamond, professeure reconnue de neurosciences à l’Université de Berkeley en Californie, la plasticité permet à notre cerveau de s’adapter tout au long de notre vie. Dans ses écrits, on peut lire qu’elle considère que l’amélioration de notre santé cognitive constitue un véritable cadeau, mais aussi une responsabilité.  

Image à la une : Unsplash