L’arrivée de lunettes abordables et la présence d’une offre de plus en plus diversifiée donnent un nouvel élan à la réalité virtuelle.
Elle fait parler d’elle depuis plus de dix ans et comme d’autres tendances, elle a été exacerbée par la crise sanitaire de COVID-19. En tourisme, la réalité virtuelle (RV) ouvre les frontières et transporte ses utilisateurs vers des lieux et des sites attrayants. Elle permet à des groupes de se trouver virtuellement à destination, d’assister à des spectacles, de visiter des musées ou même de vivre des expériences d’aventure dans des espaces naturels fragiles. En ces temps de confinement, elle répond à de multiples désirs d’évasion, d’immersion et de socialisation.
D’après Jean-Nicolas Vandelac, fondateur et PDG de la startup Hoppin’ World, incubée au MT Lab, « ce sont les besoins fondamentaux de communiquer, de se réunir, de se déplacer, de se divertir, qui sont brimés en ce moment. Du côté des attractions, des spectacles et des destinations, on aurait envie plus que jamais d’accueillir des visiteurs du monde entier. La réalité virtuelle sociale permet de faire le pont entre ces deux réalités. »
À plus long terme, la VR se présente comme une solution au tourisme de masse. Elle peut en effet s’avérer un moyen de gérer des flux, afin d’épargner certains sites surfréquentés ou menacés par les activités touristiques. D’un point de vue social, elle constitue un outil intéressant en ce qui a trait à l’accessibilité pour des personnes n’ayant pas le budget nécessaire au voyage.
Adoption des casques de réalité virtuelle par les Québécois
Selon les données tirées de l’étude Vividata* :
- 4 % des Québécois possèdent un casque de réalité virtuelle (contre 7 % des Canadiens) ;
- 3 % en ont acheté un au cours de l’année qui a précédé le sondage ;
- 5 % ont l’intention de s’en procurer un dans les 12 mois suivant l’enquête (contre 4 % des Canadiens et 4 % des Ontariens).
L’utilisation des casques de réalité virtuelle n’est pas exclusive aux jeunes générations. Pratiquement autant de baby-boomers que de Z indiquaient vouloir en acquérir un au cours de l’année.
Une offre qui s’organise
Le profil des amateurs de réalité virtuelle a évolué depuis la mise en marché des premiers casques. À sa sortie, on associait cette technologie à l’industrie des jeux vidéo. Aujourd’hui, on constate une pluralité des usages. De plus en plus de secteurs d’activité saisissent le potentiel qu’elle offre pour atteindre diverses clientèles.
Selon M. Vandelac, expert en réalité virtuelle, « on mentionne régulièrement les cas prometteurs d’utilisation de la réalité virtuelle. Par contre, on oublie souvent les coûts liés au développement d’une application dédiée et à son opération. C’est pour cette raison qu’il est avantageux de faire affaire avec une entreprise qui exploite déjà une plateforme dans le créneau qui nous intéresse. Cela permet de profiter de l’engouement de ce medium et d’une mise en marché instantanée sans les efforts, les coûts et les risques associés à un nouveau projet individuel. »
Le milieu culturel accélère un processus entamé avant la pandémie. On assiste à un mariage entre la technologie et le théâtre, la danse, la musique, les musées, etc. Pour plusieurs organismes, la réalité virtuelle leur permet de poursuivre leur mission en rendant leurs contenus accessibles auprès de leurs publics. Pour d’autres, c’est l’occasion d’explorer des avenues différentes, de renouveler leur clientèle et d’innover dans leur pratique.
Par exemple, l’Institut français a créé un catalogue pour rassembler des propositions culturelles (spectacles vivants et arts visuels) adaptées à la RV. Chaque fiche du répertoire décrit l’expérience offerte et les spécificités techniques nécessaires à l’activité. Ce type d’initiative ouvre la voie à une plus grande démocratisation de la RV.
Les secteurs de l’hôtellerie, des croisières et les destinations tirent également profit de cette technologie, entre autres pour se promouvoir auprès des voyageurs. Pour les consommateurs, la réalité virtuelle leur permet « d’essayer avant d’acheter », ce qui peut être fort rassurant lorsqu’il s’agit de lieux situés hors des sentiers battus ou de produits hauts de gamme.
Plusieurs études scientifiques se penchent sur l’impact de la réalité virtuelle en marketing. D’après un consortium de chercheurs, elle génère des émotions positives et de l’engagement chez ses utilisateurs. Ces derniers se sont montrés plus enclins à rechercher et à partager de l’information sur la destination avec les amis et la famille. Selon un second groupe de chercheurs, la réactivité, l’interactivité et la qualité du contenu de la RV peuvent stimuler les intentions de voyage des touristes prospectifs par la recherche et le partage d’information. Elle intervient ainsi comme un outil permettant de jouer positivement sur l’état d’esprit de l’utilisateur virtuel, de créer une appartenance à une marque et d’influencer ses projets de visiter la destination.
Certaines agences de voyages plus avant-gardistes ont déjà recours à des répertoires en réalité virtuelle pour aider leurs clients à planifier et réserver leur séjour à l’aide d’applications telles que Travel World VR ou encore Explor VR. Cette expérience immersive stimule les sens et rend l’étape de la planification plus concrète.
Démocratisation des casques de réalité virtuelle
Avec son casque Oculus Go introduit sur le marché en 2018, puis Quest en 2019 et enfin Quest 2 à l’automne 2020, Facebook cherche à séduire le grand public et s’est donné l’objectif de convertir près d’un milliard de personnes à la RV.
Selon monsieur Vandelac, « ces lunettes se démarquent parce qu’elles sont autonomes. Les consommateurs n’ont pas besoin d’insérer leur téléphone, d’être reliés par fils à un ordinateur ou d’avoir une pièce avec des capteurs. Elles attirent également l’attention pour leur qualité équivalente ou supérieure à leurs “grandes sœurs” et leurs prix abordables (299 $ US). Enfin, elles se distinguent par un écosystème conçu autour de la relation sociale entre les utilisateurs (la mission de Facebook). Elle brise donc l’isolement que plusieurs personnes reprochaient à la réalité virtuelle, en permettant de rejoindre des clients et des êtres chers, peu importe où chacun se trouve ».
Avec des prix plus accessibles, une multiplication des usages et une structuration de l’offre, la réalité virtuelle attirera-t-elle de nouveaux adeptes ? Seul l’avenir nous le dira. Mais force est d’admettre que le contexte actuel donne un second souffle à cette technologie.
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*Vividata est un organisme à but non lucratif réalisant depuis 2015 une étude continue à propos des habitudes de consommation des Canadiens. La collecte des données s’échelonne sur 52 semaines et les résultats sont présentés de façon trimestrielle. Les données sont pondérées de façon à assurer la représentativité de la population canadienne.
Les résultats exposés dans cet article sont ceux de l’hiver 2021, dont la collecte s’est étendue d’octobre 2019 à septembre 2020. Un peu plus de 30 000 Canadiens âgés de 18 ans et plus provenant de 10 provinces ont été sondés.
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