Ces phénomènes qui nous inquiètent

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France Lessard France Lessard

L’écoanxiété, la cybersécurité menacée, la surexposition aux réseaux sociaux : autant de mal-être que la société éprouve de nos jours. Ces phénomènes aux impacts majeurs n’épargneront pas l’industrie du tourisme.

La Chaire de tourisme Transat, en collaboration avec Tourisme Montréal, a dévoilé, le 21 janvier, les septs tendances qui rythmeront l’activité touristique dans les prochaines années. Les conférenciers Paul Arseneault et Pierre Bellerose ont partagé le fruit de leur réflexion afin d’aider les entreprises à amorcer la nouvelle décennie. Cette première analyse présente le contexte mondial dans lequel évoluera l’industrie touristique et dans lequel les grandes tendances ont pris forme.

 

Des voyageurs plus nombreux dans les airs et sur les mers

Le nombre d’arrivées internationales est passé de 920 millions en 2007 à plus de 1,34 milliard en 2017, soit une augmentation de 46 % en une décennie. Toutefois, les destinations n’ont pas toutes profité également de cette croissance. La région de l’Asie-Pacifique sort grande gagnante avec une augmentation de 70 %, alors que l’Europe et l’Amérique du Nord cèdent chaque jour plus de terrain. 

Cette augmentation est liée, entre autres, à celle de la démographie mondiale, mais aussi à l’accroissement de la richesse et des classes moyennes dans les économies émergentes, à l’amélioration globale de la mobilité, à l’arrivée massive de nouvelles générations de voyageurs et à l’évolution des technologies qui incitent, facilitent et guident nos décisions de voyage.

Source : KPMG

 

Plus d’anxiété et de questionnements sur notre façon de voyager

Parallèlement à ces réalités économiques et de croissances, d’autres phénomènes sont devenus des sources d’inquiétude et d’anxiété qui influencent déjà la façon dont les gens perçoivent le voyage.

L’écoanxiété et ses effets sur le tourisme

Le 26 novembre 2019, l’ONU a publié son Rapport 2019 sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions. Celui-ci a eu pour effet de hausser d’un cran le niveau d’alarme concernant l’urgence d’agir afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES).

Le succès des marches mondiales pour le climat, menées par la jeune activiste de 16 ans Greta Thunberg, démontre l’importance de cet enjeu pour des millions de personnes partout dans le monde.

Cette lutte contre les GES a occasionné et entraînera des répercussions sur notre perception du coût écologique de voyager, comme le montre l’ampleur du mouvement Flight Shaming (honte de prendre l’avion), amorcé en Suède. Cette initiative exhorte la population à diminuer la fréquence de ses vols.

Source: Pexels

 

La vie rêvée

La population en général et plus spécifiquement les jeunes générations souffrent d’anxiété généralisée à un niveau élevé.

Une étude menée au Centre de recherche du CHU Sainte-Justine et au Département de psychiatrie et d’addictologie de l’Université de Montréal tend à démontrer un lien entre le temps passé devant les écrans (médias sociaux, ordinateurs, télévision) et l’observation de symptômes d’anxiété et de dépression. L’expression fear of missing out (syndrôme fomo ou la peur de manquer quelque chose) décrit bien l’anxiété liée à la perception que l’on pourrait passer à côté d’un événement que les amis vivent sans nous et, ainsi, se marginaliser, d’où la nécessité de rester connecté en quasi-permanence. Malheureusement, une multitude d’images, d’articles et de blogues d’influenceurs adulés offrent une vision de styles de vie excitants et idéalisés qui favorisent les émotions négatives, l’ennui et la solitude de ceux qui les regardent.

Source: Pexels

La cybersécurité

Les derniers mois de 2019 ont été marqués par des événements majeurs de piratage de données personnelles. Pensons seulement à celui qui a affecté les 4,2 millions de clients de Desjardins ou encore au vol de données financières de ceux de British Airways.

Et l’année 2020 s’annonce fertile en cybermenaces, selon de nombreux experts en sécurité des systèmes. Ces derniers constatent que le recours à l’intelligence artificielle ne semble pas la solution la plus rassurante, puisque 69 % des consommateurs déclarent avoir peur d’être écoutés par les assistants vocaux ou même de suivre leurs recommandations.

Autre source d’inquiétude, la reconnaissance faciale de plus en plus utilisée pour assurer la sécurité dans les rues de Beijing ou de Londres, ou même à l’aéroport. En effet, son utilisation dans ces villes, devenue presque systématique, et dans les espaces publics en général, en l’absence de lois pour l’encadrer est très contestée.

 

Plus d’informations fallacieuses (infox) et de méfiance chez les voyageurs

Erronées en tout ou en partie, les informations fallacieuses (fake news) – maintenant appelées aussi « infox » – se propagent à une vitesse folle et s’avèrent de plus en plus difficiles à contrer.

Source: Pexels

Les producteurs de fausses nouvelles savent profiter de notre vulnérabilité en misant sur nos biais naturels comme notre tendance à croire que notre perception est la seule correcte et que l’information confirmant notre vision est la vérité. La concurrence toujours plus forte entre les médias incite même les journalistes à publier la nouvelle qui obtiendra un maximum de visibilité, sans nécessairement vérifier la crédibilité des sources. Ainsi, un journaliste a récemment associé le phénomène d’acqua alta (marées hautes exceptionnelles), à Venise, à la présence de touristes trop nombreux, alors que cet événement météorologique bien connu est plutôt accentué par les changements climatiques et l’enfoncement de la ville dans un sol fragile.

Dans un contexte touristique, l’abondance d’informations vraies et fausses incite les consommateurs à ne faire confiance qu’aux autres voyageurs. L’évaluation par la clientèle est ainsi devenue le deuxième critère considéré dans la décision d’achat d’un hébergement, après le prix du séjour, selon la firme TrustYou. Pourtant, beaucoup de faux avis circulent. On comprend qu’en 2019, TripAdvisor ait senti le besoin de publier son premier rapport sur les avis frauduleux observés en 2018, après qu’un journaliste a créé de toutes pièces un faux restaurant qui a été reconnu comme le meilleur de Londres, en 2017. 

Dans ce contexte de fausses nouvelles et de tromperies, il devient légitime pour le consommateur de s’interroger. Les sources de confiance ont sans cesse évolué des médias aux experts, des experts aux influenceurs, avec un retour à la base plus récemment : le cercle privé.

Source: Freepik

Pour les organisations, une relation de confiance stable et forte avec la clientèle devient de plus en plus difficile à maintenir. Pour y arriver, de nouvelles stratégies devront voir le jour afin d’attirer et de convaincre des voyageurs plus jeunes, plus sensibles à l’environnement, plus indépendants, plus exigeants et, aussi, plus anxieux et méfiants que jamais. La connaissance fine des besoins, des valeurs et des attentes de ces clientèles sera essentielle tant pour le développement de produits et de services que pour la façon de les proposer.

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Source de l’image à la une: Pexels

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