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Analyse - 21 janvier 2011

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janvier 2011

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Les achats de dernière minute: une tendance à renverser!

La popularité des réservations de dernière minute se reflète de plus en plus dans les comportements d’achat des voyageurs. Le manque de temps, la mobilité, les agences de voyages en ligne, les conditions économiques incertaines et les offres alléchantes des entreprises touristiques elles-mêmes expliquent en grande partie le renforcement de cette tendance. Mais ce qui se voulait une tactique de dernier recours pour remplir des chambres ou des sièges vides a-t-il pris une ampleur non souhaitée? Afin de renverser la vapeur, les entreprises touristiques multiplient les stratégies favorisant les consommateurs qui achètent leur voyage à l’avance. Voici un topo d’une tendance qui ne semble pas s’essouffler.

De bonnes raisons d’attendre

Depuis au moins cinq ans, et de façon plus prononcée depuis la crise économique de 2008-2009, le calendrier de réservation des entreprises touristiques a rétréci considérablement. Plutôt que de réserver sa chambre d’hôtel des mois à l’avance, comme par le passé, le consommateur d’aujourd’hui attend souvent à la toute dernière minute pour procéder à la réservation, parfois même une fois rendu devant l’établissement, à partir de son appareil mobile. Les raisons qui incitent à un tel comportement sont nombreuses. En voici quelques-unes.

  • La multiplication des courts séjours entraîne une plus grande flexibilité quant aux dates.
  • La réservation en ligne est accessible et rapide, surtout combinée à la technologie mobile.
  • En période d’incertitude économique, les consommateurs:
    • craignent pour leur emploi;
    • appréhendent la faillite des compagnies aériennes;
    • ne savent pas à l’avance s’ils pourront prendre des vacances et quelles en seront les dates.
  • L’offre des promotions de dernière minute étant devenue imposante, les gens attendent pour profiter de ces bas tarifs.

Les offres de dernière minute permettent aux entreprises d’écouler les invendus. Mais le phénomène gagne en popularité et occupe une place grandissante dans le marché du voyage. Les agences en ligne comme Expedia ont leur section «dernière minute», tout comme certains hôtels et certaines compagnies aériennes. Les agences «opaques», comme Priceline et Hotwire, qui ne divulguent le nom du fournisseur qu’une fois la transaction complétée, favorisent aussi les ventes de dernière minute et ont beaucoup de succès. L’agence Lastminute.com, quant à elle, offre désormais des forfaits de dernière… seconde!

On peut aussi se demander si les comportements de réservation des voyageurs plus jeunes, comme ceux des générations X et Y, à la recherche de liberté et plus restreints dans le temps que les baby-boomers en fin de carrière ou à la retraite, y sont pour quelque chose. C’est, du moins, ce que suppose Dori Saltzman de Travel Market Report.com.

Des Américains et des Français à la dernière minute

Selon une enquête de PhoCusWright, le quart des voyageurs américains a réservé 2 semaines ou moins à l’avance leur plus récent voyage aux États-Unis, 12% à moins de 7 jours du départ. Dans le cas des séjours à l’international, 29% ont acheté leur voyage moins d’un mois à l’avance, dont 20% à moins de 2 semaines précédant la date de départ (graphique 1).

Derniere_minute_graph1

 

Les voyageurs français ont une propension encore plus forte que les Américains à réserver à la dernière minute (graphique 2). En effet, 23% ont acheté leur dernier voyage en France moins d’une semaine à l’avance; cette proportion est de 12% pour les voyages en dehors de l’Europe. Près de la moitié (44%) a planifié son dernier séjour à l’international moins d’un mois à l’avance.

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Des achats impulsifs

Une étude de Ypartnership-Harrison Group 2010 révèle des faits étonnants sur le phénomène. Elle porte plus particulièrement sur les ventes-éclairs (flash-sales) envoyées par courriel non sollicité. Il s’agit d’offres promotionnelles de dernière minute proposées par les fournisseurs de services touristiques pour écouler leur inventaire. Les résultats de l’enquête sont plutôt surprenants. En effet, un internaute sur sept ayant reçu ce type de courriel aurait procédé à l’achat du service offert! Près de la moitié (47%) de ces acheteurs s’est déjà laissé tenter par des billets d’avion, la même proportion a succombé à des nuitées en hébergement, 38% pour des forfaits de vacances et 21% pour des croisières!

La dernière crise économique a largement renforcé ce comportement d’achat de dernière minute. Skyscanner, un site de comparaison des prix, observe des changements significatifs dans la façon de réserver les billets d’avion depuis 2008. En examinant trois routes (ou vols) très populaires au Royaume-Uni, Skyscanner enregistrait en 2008 des achats réalisés en moyenne 146 jours à l’avance alors qu’en 2009, ce nombre a chuté à 34 jours. Ironiquement, bien que ces consommateurs agissent ainsi par prudence, ils auraient probablement payé moins cher leurs billets d’avion s’ils les avaient achetés à l’avance… Et c’est sûrement là une des avenues de sensibilisation à emprunter pour redresser la situation.

Favoriser les achats de «première minute»

Inciter à acheter à l’avance en offrant des rabais demeure la stratégie la plus courante pour élargir son calendrier de réservations. Selon Patrick Landman, de Xotels, une entreprise spécialisée en gestion hôtelière, les clients particulièrement influencés par le prix sont prêts à réserver à l’avance si on leur offre une aubaine pour une date qui sort du cadre de référence. En attendant que les clients moins influencés par le prix manifestent leur intérêt, une entreprise touristique aura déjà réalisé une bonne base de réservation. Nombre d’hôtels et de compagnies de croisières jouent cette carte. Quant aux hôteliers, certains proposent aux consommateurs de réserver avant un certain nombre de jours pour bénéficier d’un rabais de 5, 10, 15 ou même 35%. Le recours au revenue management (lire: Le «Revenue Management» pour les hôteliers indépendants) s’avère ici un exercice nécessaire. Des compagnies de croisière et des voyagistes comme Transat ont aussi développé des offres avantageuses pour les «lève-tôt».

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Source: www.carnival.com

Les différentes formules d’abonnement de saison favorisent grandement les secteurs du ski ou encore celui des parcs à thème, puisqu’elles permettent aux entreprises de s’assurer un revenu minimal. Ces abonnements à prix réduit lorsqu’ils sont achetés avant une date donnée remportent beaucoup de succès et ont inspiré les parcs d’attractions et aquatiques ou encore les jardins zoologiques.

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Source: www.laronde.com

Récompenser les consommateurs prévoyants

Quoi qu’il en soit, les ventes de dernière minute occuperont toujours une place sur le marché, mais idéalement, elles devraient redevenir une option marginale ou de dernier recours. Le prix est un outil de vente, il permet de segmenter et de cibler différents marchés. Les clients influencés par le prix sont plutôt indifférents à réserver tôt. À force de récompenser les consommateurs prévoyants, une tendance vers les achats de «première minute» pourrait rétablir l’équilibre.

Source:

– Cloutier, Jean-François. «Transat change sa stratégie de prix», Argent, 24 septembre 2010.

– Landman, Patrick. «Managing Price Sensitivity in Hotels: Lastminute Deals vs. Early Bird Offers», 4Hoteliers, 28 octobre 2010.

– Mourier, Jean-François. «Secrets for making the most out of the new last-minute booking trend», Eyefortravel, 27 septembre 2010.

– Rheem, Carroll et Cathy Schetzina. «Destination Unknown: How U.S. and European Travelers Decide Where to Go», PhoCusWright, 5 octobre 2010.

– Saltzman, Dori. «Tour Trends: The Younger They Are, The Later They Book», Travel Market Report.com, 13 mai 2010.

– Skyscanner. « Skyscanner has reported a significant change in the way people are booking flights since the global downturn began», 2 février 2010.

– Yesawich, Peter. «At The Last Minute…», Ypartnership, 29 octobre 2010.

  • Jean-Frédéric Fortin

    Passionné par le monde de l’hôtellerie depuis mon plus bas âge, c’est avec beaucoup d’intérêt que je tiens rigoureusement à jour mes connaissances dans ce domaine et que je planifie effectuer dans études dans cette branche du tourisme afin d’y accomplir une carrière des plus fructueuses. À cet effet, une branche de l’hôtellerie qui retient une grande partie de mon attention est celle du yield management applicable à l’hôtellerie. Ayant lu quelques ouvrages sur le sujet, j’ai compris qu’un des principaux piliers de la gestion des revenus consiste à remplir l’hôtel à capacité maximale et ce, le plus près de la date d’arrivée possible. C’est dans cette perspective que je m’explique mal les conclusions de votre analyse. En effet, ne croyez-vous pas qu’en remplissant l’établissement trop tôt, l’hôtel contracte par le fait même un coût d’opportunité très élevé en risquant de se priver de réservations tardives qui pourraient s’avérer plus profitables? Aussi, le fait d’accepter trop de réservations à l’avance ne va-t-il pas à l’encontre du principe fondammental associé au yield management, soit celui qui avance que l’art de cette pratique consiste à accepter les réservations les plus profitables et à décliner celles qui le sont moins? Dépendamment de l’occupation de l’hôtel, les réservations en «walk-in» et les «BAR» réservés plus près de la date d’arrivée sont souvent profitables pour l’hôtel dans la mesure où les prévisions sont plus précises et permettent d’établir un prix plus juste compte tenu de la demande réelle. Et d’un autre côté, je suis conscient de l’importance qu’ont les réservations effectuées à l’avance, dans la mesure où celles-ci assurent à l’hôtel un certain niveau de revenu. À ce sujet, ne croyez-vous pas que les tarifs prépayés offerts par les hôtels permettent de répondre à ce besoin? En toute honnêteté, j’ai l’impression qu’un hôtel rempli trop tôt est un hôtel qui n’ose pas prendre de risques calculés. Et sans ces risques calculés, j’estime que l’hôtel est difficilement en position d’améliorer sa rentabilité. Qu’en pensez-vous? Je suis curieux d’avoir votre opinion d’experte sur le sujet. Et qu’en pensent les directeurs de la gestion des revenus et les directeurs généraux qui lisent ce commentaire? Est-ce moi qui caresse une idée maintenant devenue révolue ou irréaliste? J’aimerais avoir votre vision à cet effet. Merci!

    • Claudine Barry

      Monsieur Fortin,

      Merci pour votre commentaire. En effet, l’idée ici consiste à rétablir l’équilibre et non pas à faire en sorte que toutes les réservations se prennent des mois à l’avance. Néanmoins, les achats de dernière minute occupent une place grandissante dans le comportement des consommateurs. Certains auteurs parlent même du phénomène comme étant la «nouvelle norme». L’analyse ci-dessus suggère plutôt des façons d’atténuer cette tendance pour retrouver un certain équilibre. Effectivement, le yield management s’avère un outil très rentable pour l’hôtelier qui l’utilise de façon efficace.

    • cath SIMON

      je suis tombée sur votre comentaire déjà un peu ancien…mais je suis Aujour’hui confronté au problème cer (c’est la première année que je sens le changement d’attitude de la clientèle) …
      Etes vous dans le métier, je ne suis modeste je tiens un B and B ….
      Je cherche des réponses à un tas de questionnements sur ma gestion…
      Merci de votre réponse.

  • Camille A.

    Très intéressant comme article. Par contre, je constate qu’à certains endroits et moments de l’année, les réservations sont tellement de mise qu’il est difficile voire impossible de se présenter le jour même, que ce soit à un hôtel, un camping ou pour participer à une excursion. Ce qui est une bonne nouvelle pour l’industrie a tué beaucoup de spontanéité lors de nos voyages.

    Si vous constatez des réservations de dernière minute, je trouve finalement que ce n’est pas une mauvaise nouvelle, et que les deux types d’offre devraient être présentes pour retrouver un peu de spontanéité, tout en assurant une certaine sécurité pour les loueurs et auprès des gens qui veulent être assurés de leur horaire de voyage.

  • Marie-Eve

    Ayant travaillé dans une auberge en forêt depuis les 5 dernières années, j’ai pu constater certains effets de la réservation de dernière minute.
    Tout d’abord. qui dit entreprise établie en région, dit également approvisionnement en nourriture et boisson selon un horaire de livraison restreint. Celui-ci se résume souvent à une à quatre fois par mois et ce, même durant les hautes saisons. Alors imaginez comment il devient difficile de gérer les coûts d’inventaire efficacement en fonction des prévisions de réservations.
    Depuis deux ans, le recrutement a également été plus difficile à cause du ‘dernière minute’. Comment garantir à un futur employé sa date d’embauche, le nombre de semaines que durera son contrat pour la saison ou même une moyenne de son revenu potentiel? Comment avoir une banque d’employés compétents sur appel suffisamment grosse pour toutes ces journées où les clients arrivent à l’improviste? Comment maintenir un taux de rétention intéressant dans de tels conditions?
    Pour ma part, je suis bien d’avis qu’une augmentation des réservations de première minute facilitait le travail de gestion et ce, sans pour autant rendre impossible le ‘Yield Manadgement’.

  • Benoit

    Bon article, par contre je persiste à croire que la base des ventes de dernière minute repose sur deux éléments essentiels:

    1. La disparité entre l’offre (beaucoup plus grande) et la demande à tout les niveaux (hébergements et transport si il y a lieux) jumelé à une présence importante de joueurs qui offrent tout ces produits relativement similaires;

    2. L’accessibilité à cette information via internet;

    Tant et aussi longtemps que ces phénomènes seront présent le prix des ventes seront appellé à la baisse et il est douteux de penser que les ventes de dernières minutes seront appellées à la baisse.

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